67.1
Je vois Jésus marcher tout seul sur un chemin ombragé, on dirait dans une fraîche petite vallée bien arrosée. Je dis une petite vallée car elle est légèrement encaissée entre deux hauteurs, et au centre coule un petit cours d’eau.
A cette heure matinale, l’endroit est désert. Le jour doit à peine pointer, une belle journée sereine d’un début d’été. A part les chants des oiseaux dans les arbres – il s’agit surtout d’oliviers, en particulier sur la colline de gauche, alors que l’autre, plus dépouillée, est couverte de petits arbustes : lentisques, acacias épineux, agaves, etc. –, bref, à part ces chants et le triste roucoulement des tourterelles sauvages qui font leurs nids dans les fissures d’une colline plus aride, on n’entend rien. Le petit torrent lui-même, dont les eaux peu abondantes ne coulent qu’au centre de son lit, semble ne faire aucun bruit et passe en réfléchissant dans ses eaux la verdure qui l’entoure et lui donne une couleur d’émeraude foncée.
Jésus franchit un petit pont rudimentaire : un tronc à moitié équarri, jeté sur le torrent, sans garde-fou, sans rien pour se protéger, et il continue son chemin sur l’autre rive.
On voit maintenant des murs et des portes ; des marchands de légumes et de victuailles se pressent devant les portes encore fermées pour entrer dans la ville. Les ânes braient et se bagarrent. Leurs propriétaires eux-mêmes ne plaisantent pas. Insultes et même coups pleuvent non seulement sur l’échine des ânes, mais aussi sur les têtes des hommes.