Je fais ce que dit la Loi.
– Non. Ecoute : la Loi dit de ne pas commettre l’adultère, or tu vas le commettre. Le commandement donné à l’origine, c’est celui-là et pas un autre. Si, à cause de la dureté de vos cœurs, Moïse vous a permis le divorce, ce fut pour empêcher les liaisons immorales et les concubinages qui sont odieux à Dieu. Puis votre vice n’a cessé d’étendre cette clause de Moïse, jusqu’à obtenir les chaînes inhumaines et les pierres homicides qui sont les conditions actuelles de la femme, toujours victime de votre domination, de vos caprices, de votre surdité, de votre aveuglement en fait d’affections. Je te le dis : ce que tu as l’intention de faire ne t’est pas permis. Cet acte est une offense à Dieu. Abraham a-t-il donc répudié Sarah ? Et Jacob, Rachel ? Et Elqana, Anne ? Et Manoah, son épouse ? Connais-tu Jean-Baptiste ? Oui ? Eh bien, sa mère n’a-t-elle pas été stérile jusqu’à sa vieillesse avant d’enfanter le saint de Dieu, tout comme l’épouse de Manoah enfanta Samson, Anne, femme d’Elqana, Samuel et encore Rachel Joseph, ou Sarah Isaac ? A la continence de l’époux, à sa pitié pour son épouse stérile, à sa fidélité aux promesses de son mariage Dieu a accordé une récompense, une récompense célébrée au cours des siècles. De même, il donne le sourire à la femme stérile éplorée qui n’est plus ni stérile ni méprisée, mais obtient la gloire et la joie de la maternité. Il ne t’est pas permis d’offenser l’amour de ta femme. Sois juste et honnête. Dieu t’accordera une récompense qui dépassera tes mérites.
– Maître, tu es bien le seul à parler ainsi… Moi, je ne savais pas. J’avais demandé aux docteurs et ils m’avaient répondu : “ Fais-le. ” Pas un mot pour me dire que Dieu récompense de ses dons une bonne conduite. Nous sommes entre leurs mains… et ils nous ferment les yeux et le cœur avec une main de fer. Je ne suis pas méchant, Maître. Ne me méprise pas.
– Je ne te méprise pas. Tu me fais encore plus pitié que cette femme en pleurs, car sa douleur finira avec sa vie. C’est alors que commencera la tienne, et pour l’éternité. Penses-y.
– Non, elle ne commencera pas. Je ne le veux pas. Me jures-tu sur le Dieu d’Abraham que ce que tu me dis est la vérité ?
– Je suis la Vérité et la Science. Qui croit en moi possèdera justice et sagesse, amour et paix.
– Je veux te croire. Oui, je veux te croire. Je sens qu’il y a en toi quelque chose qui n’existe pas chez les autres. Voilà : je vais aller voir le prêtre pour lui dire : “ Je ne la répudie plus. Je la garde, et je demande seulement à Dieu de m’aider à ressentir moins durement la douleur de ne pas avoir d’enfant. ” Aava, ne pleure pas. Nous dirons au Maître de revenir pour me permettre de rester bon, et toi… continue à m’aimer. »
Le contraste de sa souffrance passée avec sa joie actuelle augmente les pleurs de la femme.
Jésus sourit, au contraire.
« Ne pleure pas. Regarde-moi. Regarde-moi, femme. »
Elle lève la tête et contemple, à travers ses larmes, le visage lumineux de Jésus.
« Viens ici, homme. Agenouille-toi auprès de ton épouse. Maintenant, je vous bénis et je sanctifie votre union. Ecoutez : “ Seigneur, Dieu de nos pères, qui avec de la boue as fait Adam et lui as donné Eve pour compagne, pour qu’ils peuplent pour toi la terre et élèvent leurs enfants dans ta sainte crainte, descends avec ta bénédiction et ta miséricorde, ouvre et féconde les entrailles que l’Ennemi maintenait fermées pour les porter à un double péché d’adultère et de désespoir. Aie pitié de ces deux enfants, Père saint, Créateur suprême. Rends-les heureux et saints. Rends cette femme féconde comme une vigne, et que cet homme soit son protecteur comme le tuteur qui soutient la vigne. Descends, ô Vie, pour donner la vie. Descends, ô Feu, pour réchauffer. Descends, ô Puissant, pour agir. Descends ! Fais que, à la fête de louange pour les moissons fécondes de l’année qui vient, ils t’offrent leur gerbe vivante, leur premier-né, un fils qui te soit consacré, à toi l’Eternel qui bénis ceux qui espèrent en toi. ” »
Jésus a prié d’une voix de tonnerre, les mains posées sur les deux têtes inclinées.