The Writings of Maria Valtorta

178. Trois hommes qui veulent suivre Jésus.

178. The three different man who wish to follow Jesus.

178.1

Je vois Jésus se diriger vers la rive du lac avec les onze, car Jean est toujours absent. Beaucoup de gens s’attroupent autour de lui : nombre d’entre eux étaient sur la montagne, pour la plupart des hommes qui l’ont rejoint à Capharnaüm pour entendre encore sa parole. Ils voudraient le retenir, mais il dit :

« J’appartiens à tout le monde et il y en a beaucoup qui doivent me posséder. Je reviendrai. Vous me rejoindrez. Mais pour l’instant, laissez-moi partir. »

Il a beaucoup de mal à se frayer un chemin à travers la foule entassée sur le chemin étroit. Les apôtres jouent des coudes pour qu’on le laisse passer. Mais c’est comme s’ils s’attaquaient à une substance molle qui aussitôt se reforme comme elle était. Ils se fâchent même, mais en vain.

178.2

Ils arrivent déjà près du rivage lorsque, après une lutte acharnée, un homme d’âge moyen et de condition honorable s’approche du Maître et, pour attirer son attention, lui touche l’épaule.

Jésus s’arrête et se retourne :

« Que veux-tu ?

– Je suis scribe, mais ce qu’il y a dans tes paroles ne peut se comparer à ce que renferment nos préceptes. Elles m’ont conquis. Maître, je ne te quitte plus. Je te suivrai partout où tu iras. Quelle est ta route ?

– Celle du Ciel.

– Ce n’est pas d’elle que je parle. Je te demande où tu vas. Après celle-ci, quelles sont les maisons où je pourrai toujours te trouver ?

– Les renards ont leurs tanières et les oiseaux leurs nids, mais le Fils de l’homme n’a pas où reposer sa tête. Ma maison, c’est le monde, partout où il y a des âmes à instruire, des misères à soulager, des pécheurs à racheter.

– Partout, alors.

– Tu l’as dit. Toi qui es docteur d’Israël, pourrais-tu faire ce que ces tout-petits font par mon amour pour moi ? Ici, on exige sacrifice, obéissance, charité envers tous, ainsi que l’esprit d’adaptation en tout, avec tous. Car la compréhension attire. Celui qui veut soigner doit se pencher sur toutes les plaies. Après, ce sera la pureté du Ciel. Mais ici, nous sommes dans la boue et il faut arracher à la boue, sur laquelle nous posons les pieds, les victimes déjà submergées. Ne pas relever ses vêtements, ni s’éloigner parce que la boue est plus profonde à cet endroit. La pureté, c’est en nous qu’elle doit être. Il faut en être pénétré de façon que rien ne puisse plus entrer. Peux-tu tout cela ?

– Laisse-moi essayer au moins.

– Essaie. Je prierai pour que tu en sois capable. »

178.3

Jésus se remet en route et, attiré par deux yeux qui le regardent, il dit à un jeune homme grand et robuste qui s’est arrêté pour laisser passer le cortège, mais qui semble se diriger ailleurs :

« Suis-moi. »

Le jeune homme sursaute, change de couleur, cligne des yeux comme s’il était ébloui par de la lumière, puis il ouvre la bouche pour parler, mais ne trouve pas de réponse. Finalement, il dit :

« Je te suivrai, mais mon père est mort à Chorazeïn et je dois l’ensevelir. Laisse-moi faire, et je viendrai ensuite.

– Suis-moi. Laisse les morts ensevelir leurs morts. Toi, la Vie t’a déjà aspiré. Tu l’as désiré, d’ailleurs. Ne déplore pas le vide que la Vie a créé autour de toi afin de t’avoir pour disciple. Les mutilations de l’affection sont des racines pour les ailes qui poussent chez l’homme changé en serviteur de la vérité. Abandonne la corruption à son sort. Elève-toi vers le Royaume où rien n’est corrompu. Tu y trouveras aussi la perle incorruptible de ton père. Dieu appelle et passe. Demain, tu ne trouverais plus ton cœur d’aujourd’hui ni l’invitation de Dieu. Viens. Va annoncer le Royaume de Dieu. »

L’homme, adossé à un muret, reste les bras ballants. Il porte des sachets certainement remplis d’arômes et de bandelettes. La tête inclinée, il réfléchit aux deux amours qui s’opposent : celui de Dieu et celui de son père.

Jésus attend et le regarde, puis il prend un petit enfant et le serre sur son cœur en disant :

« Dis avec moi : “ Je te bénis, Père, et j’invoque ta lumière pour ceux qui pleurent dans les nuées de la vie. Je te bénis, Père, et j’invoque ta force pour celui qui est comme un bébé qui a besoin qu’on le soutienne. Je te bénis, Père, et j’invoque ton amour pour que tu fasses oublier tout ce qui n’est pas toi à tous ceux qui ne savent pas croire, mais qui trouveraient en toi tout bien, ici et au Ciel. ” »

Et le petit, un enfant d’environ quatre ans, répète de sa petite voix les paroles saintes, ses menottes jointes pour la prière dans la main droite de Jésus qui tient ses poignets potelés comme si c’étaient deux tiges de fleurs.

L’homme se décide. Il donne ses paquets à un compagnon et vient à Jésus qui dépose l’enfant par terre après l’avoir béni. Il prend par les épaules le jeune homme et avance ainsi, pour le réconforter et le soutenir dans son effort.

178.4

Un troisième homme l’interroge :

« Moi aussi, je voudrais venir avec lui, mais avant de te suivre, je voudrais faire mes adieux à mes parents. Me le permets-tu ? »

Jésus le regarde fixement et répond :

« il y a en toi trop de racines qui plongent dans l’humain. Arrache-les et, si tu n’y arrives pas, coupe-les. Il faut venir au service de Dieu en pleine liberté d’esprit. Rien ne doit lier celui qui se donne.

– Mais, Seigneur, la chair et le sang sont toujours chair et sang ! J’arriverai lentement à la liberté dont tu parles…

– Non. Non, tu n’y arriverais jamais plus. Dieu est exigeant, de même qu’il est infiniment généreux quand il récompense. Si tu veux être disciple, il faut embrasser la croix et venir. Autrement, on reste au nombre des simples fidèles. Ce n’est pas une voie jonchée de pétales de roses que celle d’un serviteur de Dieu. Ses exigences sont absolues. Personne, après avoir mis la main à la charrue pour labourer les champs des cœurs et y jeter la semence de la doctrine de Dieu, ne peut se retourner pour regarder ce qu’il a quitté, et ce qu’il a perdu, ce qu’il pouvait posséder en suivant la voie commune. Celui qui agit ainsi n’est pas apte au Royaume de Dieu. Travaille-toi toi-même. Virilise-toi toi-même, puis viens. Pas maintenant. »

On a atteint la rive. Jésus monte dans la barque de Pierre en lui chuchotant quelques mots. Je vois Jésus sourire et Pierre faire un geste d’émerveillement. Mais il ne dit rien. L’homme qui n’est pas allé ensevelir son père pour suivre Jésus monte aussi.

178.1

I see Jesus heading towards the lake with eleven apostles, as John is still absent. Many people press around Him: among them there are many who were on the Mount, mainly men, who have reached Him at Capernaum to hear His words once again. They would like to detain Him. But He says: «I belong to everybody. And there are many who are entitled to have Me. I will come back. You will join Me. But let Me go now.» He has difficulty in walking through the crowd who throng the little narrow street. The apostles push with their shoulders to make room for Him. But it is like pushing a spongy substance that immediately springs back again. They get angry, too, but to no avail.

178.2

They are already in sight of the lake, after a fierce struggle, when a middle-aged refined looking man goes near the Master and touches His shoulder to attract His attention.

Jesus turns around and stops, asking: «What do you want?»

«I am a scribe. But our precepts can in no way be compared to Your word and I am fascinated by it. Master, I do not want to leave I will follow You wherever You go. Which way are You going?»

«The way to Heaven.»

«I do not mean that. I am asking You where are You going now. In which houses will You stop after the present one, so that I may always find You?»

«Foxes have holes and the birds of the air have nests, but the Son of Man has nowhere to lay His head. The world is My home, wherever there are spirits to be taught, distress to be relieved, sinners to be redeemed.»

«Everywhere, then.»

«You are right. Can you, a doctor in Israel, do what these simple men do for My sake? This is what is required here: sacrifice, obedience, charity for everybody, a mind adaptive for everything and with everybody. Because compliance is alluring. Because he who wishes to cure must bend over all sores. Afterwards there will be the purity of Heaven. But here we are in mud and we have to pull out of the mud, on which we walk, the victims already submerged in it. We cannot lift our clothes and move to one side because the mud is deeper there. Purity must be within us. We must be filled with it so that nothing else can enter. Can you do all that?»

«At least let me try.»

«Try. I will pray that you may succeed.»

178.3

Jesus begins to walk again and His attention is drawn by two eyes staring at Him, the eyes of a tall strong young man who has stopped to let the train of followers pass, as he seems to be going in a different direction. Jesus says to him: «Follow Me.»

The young man starts, changes colour, blinks as if he were dazzled by light, then opens his mouth to speak but cannot find an immediate reply. At last he says: «I will follow You. But my father died at Korazim and I must bury him. Let me do that and then I will come.»

«Follow Me. Leave the dead to bury their dead. You have already been attracted by Life. On the other hand, you aspired that. Do not weep over the gap Life opened around you to make you a disciple. The maiming of affection is the root of the wings which are born of a man who has become a servant of the Truth. Leave corruption to its own fate. Rise towards the Kingdon of the incorrupt. You will also find the incorruptible pearl of your father there. God calls and passes by. Tomorrow you would no longer find your heart of today or God’s invitation. Come. Go and announce the Kingdom of God.»

The man is leaning against a low wall with his arms hanging by his sides: he is holding two bags, full of perfumes and bandages, his head is lowered in thought, wavering between two loves: for God and for his father.

Jesus waits and looks at him, he then gets hold of a little child clasps him to His heart saying: «Say with Me: “I bless You, o Father, and I invoke Your light for those who weep in the haze of life. I bless You, o Father, and I invoke Your strength for those who are like a child in need of support. I bless You, o Father, and I invoke Your love that it may cause men to forget everything which is not Yourself, as they can find all good in You, both here and in Heaven, although they cannot believe it”.» And the child, an innocent boy about four years old, repeats in his thin voice the holy words with his hands held in prayer by the right hand of Jesus, Who holds them by their plump, wrists as if they were two flower stems.

The man makes up his mind. He hands the two bundles to a companion and comes towards Jesus, Who puts down the child after blessing him, and embraces the young man, proceeding thus with him, to comfort him and support him in his effort.

178.4

Another man questions Him: «I would like to come with You, too. But before following You I would like to take leave of my relatives, Will You allow me?»

Jesus stares at him and replies: «There are too many roots in your human being. Uproot them and if you cannot, cut them off. One must come to God’s service with spiritual freedom. He who gives himself, must have no ties.»

«Flesh and blood are always flesh and blood. I will slowly reach the freedom You refer to…»

«No, you would never reach it. God is as exacting as He is infinitely generous in rewarding. If you wish to be a disciple you must embrace your cross and follow Me. Otherwise one remains a simple believer. The way of the servant of God is not strewn with petals of roses. And it is absolute in its demands. No one who has put his hand to the plough to furrow the fields of hearts and spread there the seed of God’s doctrine, can look back to see what he left, what he lost and what he could have had if he had followed another common way. He who does that is not fit for the Kingdom of God. Work upon yourself. Make a man of yourself and then come. Not now.»

They reach the shore. Jesus goes on board Peter’s boat and whispers a few words to him. I see Jesus smile while Peter makes a gesture expressing amazement. But He does not say anything. Also the man who did not go to bury his father in order to follow Jesus, gets into the boat.