The Writings of Maria Valtorta

180. Discussion dans la cuisine de Pierre à Bethsaïde.

180. Discussions in the kitchen of Peter in Bethsaida.

180.1

Nous revoilà dans la cuisine de Pierre. Le repas doit avoir été copieux car les plats, avec les restes de poisson et de viande, de fromage, de fruits secs ou du moins flétris, de fouaces au miel, s’entassent sur une sorte de crédence qui rappelle un peu nos maies de Toscane. Sur la table, amphores et coupes sont encore en désordre.

L’épouse de Pierre doit avoir fait des miracles pour faire plaisir à son mari et elle y a sans doute travaillé toute la journée. Maintenant, fatiguée mais heureuse, elle reste dans son coin et écoute ce que dit son mari et ce dont parlent les autres. Elle le regarde, son Simon qui, pour elle, doit être un grand homme, même s’il est un peu exigeant. Quand elle l’entend converser d’une nouvelle façon, lui qui auparavant ne parlait que de barques, de filets, de poisson et d’argent, elle cligne des yeux comme si elle était éblouie par une lumière trop vive. Que Pierre soit heureux d’avoir Jésus à sa table ou satisfait du copieux repas qui a été servi, il est vraiment en veine ce soir et en lui se révèle le futur Pierre qui prêchera aux foules.

Je ne sais quelle observation d’un compagnon a donné naissance à la réponse bien frappée de Pierre :

« Il leur arrivera ce qui est arrivé aux bâtisseurs de la tour de Babel[1]. Leur orgueil provoquera l’écroulement de leurs théories et ils en seront écrasés. »

André objecte à son frère :

« Mais Dieu est miséricorde. Il empêchera l’écroulement pour leur donner le temps de se repentir.

– Ne pense pas cela. Pour couronner leur orgueil, ils emploieront la calomnie et la persécution. Ah ! Moi, je le pressens déjà. Des persécutions contre nous, pour nous disperser comme des témoins odieux. Et comme ils attaqueront traîtreusement la Vérité, Dieu exercera sa vengeance et ils périront.

– Aurons-nous la force de résister ? demande Thomas.

– Voilà… moi je ne l’aurais pas, mais je me fie à lui. »

Pierre désigne le Maître qui écoute sans mot dire, debout, la tête un peu inclinée comme pour cacher son visage expressif.

« Je pense que Dieu ne nous fera pas supporter des épreuves supérieures à nos forces, dit Matthieu.

– Ou pour le moins, il augmentera nos forces en proportion des épreuves, conclut Jacques, fils d’Alphée.

– Il le fait déjà.

180.2

Moi, j’étais riche et puissant. Si Dieu n’avait pas voulu me garder pour ses desseins, j’aurais péri dans le désespoir quand j’étais persécuté et lépreux. Je me serais acharné contre moi-même… Au lieu de cela, sur mon complet écroulement descendit une richesse nouvelle que je n’avais jamais possédée auparavant : la richesse d’une certitude : “ Dieu existe. ” Avant… Dieu… Oui, j’étais croyant, j’étais un juif fidèle. Mais ma foi était faite de formalismes. Et il me semblait que la récompense était toujours inférieure à mes vertus. Je me permettais de discuter avec Dieu car je me sentais encore quelqu’un sur la terre. Simon-Pierre a raison. Moi aussi, j’édifiais une tour de Babel en faisant mes propres éloges et en étant satisfait de moi. Lorsque tout s’écroula sur moi et que je fus un ver écrasé sous le poids de tout cet aspect humain inutile, alors ce n’est plus avec Dieu que j’ai discuté, mais avec moi-même, avec le fou que j’étais, et j’ai achevé de le démolir. Et plus je le faisais, en frayant un chemin à ce que je crois être le Dieu immanent au-dessus de notre être de terrestres, plus je trouvais une force, une richesse nouvelles, la certitude que je n’étais pas seul et que Dieu veillait sur l’homme vaincu par l’homme et par le mal.

– Selon toi, qui penses-tu qu’est Dieu, lui que tu as qualifié de “ Dieu immanent au-dessus de notre être de terrestres ” ? Que veux- tu dire ? Je ne comprends pas et cela me semble une hérésie. Dieu est celui que nous connaissons à travers la Loi et les prophètes, il n’y en a pas d’autre, dit Judas sur un ton un peu sévère.

– Si Jean était là, il le dirait mieux que moi, mais moi je le dis comme je sais. Dieu est celui que nous connaissons à travers la Loi et les prophètes, c’est vrai. Mais en quoi le connaissons-nous ? Comment ? »

Jude bondit :

« Peu et mal. Les prophètes, qui nous l’ont décrit, le connaissaient encore, eux. Mais nous, nous en avons une idée confuse qui filtre à travers tout l’encombrement d’un tas d’explications accumulées par les sectes…

– Des sectes ? Mais que dis-tu ? Nous n’avons pas de sectes. Nous sommes tous les fils de la Loi, intervient Judas sur un ton indigné, agressif.

– Les fils des lois, mais pas de la Loi. Il y a une légère différence entre le singulier et le pluriel. Mais, dans la réalité, voilà ce qu’il en est : nous sommes les fils de ce que nous avons créé et non plus de ce que Dieu nous a donné, explique Jude.

– Les lois sont nées de la Loi, répond Judas.

– Les maladies aussi naissent de notre corps, et tu ne veux tout de même pas me dire que ce sont de bonnes choses ! Rétorque Jude.

– Mais permettez-moi de savoir ce qu’est le Dieu immanent de Simon le Zélote. »

Judas, qui ne peut répliquer à l’observation de Jude, essaie de ramener la question à son point de départ.

180.3

Simon le Zélote intervient :

« Il faut toujours à nos sens un mot pour saisir une idée. Chacun de nous – je parle de nous qui croyons – croit par la force de la foi au très haut Seigneur et Créateur, le Dieu éternel qui est au Ciel. Mais tout être a besoin de plus que cette foi nue, vierge, incorporelle, apte et suffisante aux anges qui voient et aiment Dieu spirituellement, puisqu’ils partagent avec lui la nature spirituelle et ont la capacité de voir Dieu. Mais nous autres, nous avons besoin de nous créer une “ image ” de Dieu. Cette image est faite des qualités essentielles que nous attribuons à Dieu pour donner un nom à sa perfection absolue, infinie. Plus l’âme se concentre, plus elle arrive à atteindre une connaissance de Dieu exacte. Voici ce que j’entends par “ le Dieu immanent ”. Je ne suis pas philosophe. Je n’emploie peut-être pas le bon terme. Mais, pour moi, le Dieu immanent est en somme le sentiment de Dieu, la perception de Dieu qu’a notre âme, c’est le fait de le sentir et de le percevoir non plus comme une idée abstraite, mais comme une présence réelle qui nous donne une force et une paix nouvelles.

– C’est bien. Mais comment en as-tu le sentiment ? Quelle différence y a-t il entre sentir par la foi et sentir par l’immanence ? demande Judas avec quelque ironie.

– Dieu est sécurité, mon garçon, dit Pierre. Simon emploie ce mot de sentiment, que je ne comprends pas littéralement, mais dont je comprends l’esprit — et sois bien sûr que notre mal est de comprendre seulement la lettre, et non l’esprit des paroles de Dieu —. Quand donc tu sens Dieu comme le dit Simon, cela veut dire que tu parviens à saisir non seulement le concept de la majesté terrible de Dieu, mais aussi celui de sa très douce paternité. Cela veut dire que tu sens que, même si le monde entier te jugeait et te condamnait injustement, un seul être, lui, l’Eternel qui est pour toi un Père, ne te juge pas, mais t’absout et te console. Cela veut dire que tu sens que, même si tout le monde te haïssait, tu sentirais sur toi un amour plus grand que le monde entier. Cela veut dire que, isolé dans une prison ou un désert, tu entendrais toujours Quelqu’un te parler et te dire : “ Sois saint pour être comme ton Père. ” Cela veut dire que, par un amour vrai pour le Dieu Père, que finalement on arrive à percevoir comme tel, on accepte, on travaille, on prend ou on laisse sans mesure humaine, en ne pensant qu’à rendre amour pour amour, qu’à imiter Dieu le plus possible dans ses propres actions.

– Tu es bien orgueilleux ! Imiter Dieu ! Cela ne t’est pas permis, juge Judas.

– Ce n’est pas de l’orgueil. L’amour porte à l’obéissance. Copier Dieu me semble encore être une forme d’obéissance, puisque Dieu dit nous avoir fait à son image et à sa ressemblance, réplique Pierre.

– Il nous a faits. Nous, nous ne devons pas nous élever plus haut.

– Mais tu es bien malheureux, si tu penses cela, mon cher garçon ! Tu oublies que nous sommes déchus et que Dieu veut nous ramener à ce que nous étions. »

180.4

Jésus prend la parole :

« Plus encore, Pierre, Judas et vous tous. Plus encore. La perfection d’Adam était encore susceptible de s’accroître grâce à l’amour qui l’aurait amené à devenir l’image toujours plus exacte de son Créateur. Adam, sans la tache du péché, aurait été un très pur miroir de Dieu. C’est pourquoi je dis : “ Soyez parfaits comme le Père qui est aux Cieux est parfait. ” Comme le Père, donc comme Dieu. Pierre a très bien parlé, de même que Simon. Je vous prie de vous rappeler leurs paroles et de les appliquer à vos âmes. »

Il s’en faut de peu que l’épouse de Pierre ne s’évanouisse de joie en entendant un tel éloge de son mari. Calme, heureuse, elle pleure derrière son voile. Pierre semble avoir une attaque d’apoplexie tant il devient rouge. Il reste muet un instant, puis il dit :

« Eh bien, alors, donne-moi la récompense. La parabole de ce matin… »

Les autres s’unissent à Pierre :

« Oui, tu l’as promis. Les paraboles sont bien utiles pour faire comprendre la comparaison, mais nous, nous comprenons qu’elles ont un sens qui dépasse la comparaison.

180.5

Pourquoi leur parles-tu en paraboles ?

– Parce qu’il n’est pas accordé à tous de comprendre plus que ce que j’explique. A vous, mes apôtres, il est donné beaucoup plus car vous devez connaître le mystère, de sorte qu’il vous est donné de comprendre les mystères du Royaume des Cieux. C’est pourquoi je vous dis : “ Demandez si vous ne comprenez pas l’esprit de la parabole. ” Vous donnez tout et tout vous est donné, pour qu’à votre tour vous puissiez tout donner. Vous donnez tout à Dieu : affections, temps, intérêts, liberté, vie. En compensation, Dieu vous donne tout ; il veut ainsi vous rendre capables de tout donner au nom de Dieu à ceux qui viendront après vous. Ainsi, à celui qui a donné on donnera, et en abondance. Mais à celui qui n’a donné qu’en partie ou pas du tout, on enlèvera même ce qu’il a.

Je leur parle en paraboles pour que, en voyant, ils découvrent seulement ce qu’éclaire leur volonté d’adhésion à Dieu, et pour que, en écoutant, toujours par leur volonté d’adhésion, ils entendent et comprennent. Vous, vous voyez ! Beaucoup de gens entendent ma parole, peu adhèrent à Dieu. Leur âme est privée de bonne volonté. En eux s’accomplit la prophétie[2] d’Isaïe : “ Vous écouterez avec vos oreilles et vous n’entendrez pas. Vous regarderez de vos yeux et vous ne verrez pas. ” Car ce peuple a le cœur insensible, les oreilles dures et les yeux fermés pour ne pas voir et ne pas entendre, pour ne pas comprendre avec leurs cœurs et ne pas se convertir afin que je les guérisse. Mais bienheureux êtes-vous de ce que vos yeux voient et vos oreilles entendent, en raison de votre bonne volonté !

En vérité, je vous dis que bien des prophètes et des justes ont désiré voir ce que vous voyez et ne l’ont pas vu, entendre ce que vous entendez et ne l’ont pas entendu. Ils se sont consumés du désir de comprendre le mystère des paroles, mais, une fois éteinte la lumière de la prophétie, ces paroles sont restées comme des charbons éteints, même pour le saint qui les avait reçues.

Seul Dieu se révèle lui-même. Quand sa lumière se retire, après avoir atteint son but d’éclairer le mystère, l’incapacité de comprendre enserre, comme les bandelettes d’une momie, la vérité royale de la parole reçue. C’est pour cette raison que je t’ai dit ce matin : “ Un jour viendra où tu retrouveras tout ce que je t’ai donné. ” Aujourd’hui, tu n’arrives pas à le retenir. Mais, plus tard, la lumière viendra sur toi, non pas pour un instant, mais pour une indissoluble union de l’Esprit éternel avec ton âme, qui rendra infaillible ton enseignement sur ce qui concerne le Royaume de Dieu. Il en ira de tes successeurs comme pour toi, s’ils vivent de Dieu comme unique pain[3].

180.6

Maintenant, écoutez l’esprit de la parabole.

Nous avons quatre sortes de champs : ceux qui sont fertiles, ceux qui sont infestés d’épines, ceux où abondent les pierres, ceux qui sont traversés de sentiers. Nous avons aussi quatre sortes d’âmes.

Nous avons les âmes honnêtes, les âmes de bonne volonté, préparées par leur travail personnel et par celui d’un apôtre, d’un “ véritable ” apôtre – car certains en portent le nom sans en avoir l’esprit. Ceux-là sont plus meurtriers pour les volontés en formation que les oiseaux, les épines et les pierres. Par leurs intransigeances, leurs hâtes, leurs reproches, leurs menaces, ils déroutent de telle façon qu’ils éloignent pour toujours de Dieu. Il y en a d’autres, à l’opposé, qui, par un arrosage continuel de bienveillance déplacée, font pourrir la semence dans une terre trop molle. Par leur manque de virilité, ils dévirilisent les âmes dont ils s’oc­cupent –.

Mais n’envisageons que les vrais apôtres, ceux qui sont de purs miroirs de Dieu. Ils sont paternels, miséricordieux, patients et en même temps forts comme l’est leur Seigneur. Les âmes préparées par eux et par leur propre volonté peuvent être comparés aux champs fertiles, sans pierres ni ronces, sans ivraie ni chiendent. En eux prospère la parole de Dieu, et toute parole – une semence – produit un germe, une herbe et des épis, en donnant ici cent pour cent, plus loin soixante, ailleurs encore trente pour cent. Y en a-t-il parmi ceux qui me suivent ? Certainement, et ils seront saints. Parmi eux, il y en a de toutes les castes, de tous les pays. Il y a même parmi eux des païens, qui donneront pourtant cent pour cent, grâce à leur bonne volonté, uniquement grâce à elle, ou bien accompagnée de celle d’un apôtre ou d’un disciple qui me les prépare.

Les champs épineux sont ceux où l’incurie a laissé pénétrer les enchevêtrements des intérêts personnels qui étouffent la bonne semence. Il faut se surveiller sans cesse et ne jamais prétendre : “ Oh, désormais je suis formé, ensemencé, je puis être tranquille : je donnerai des semences de vie éternelle. ” Il faut se surveiller : le combat entre le Bien et le Mal est continuel. Avez-vous jamais observé une tribu de fourmis qui s’installent dans une maison ? Les voilà sur le foyer. La femme n’y laisse plus de nourriture et la met sur la table : elles flairent l’air et donnent assaut à la table. La femme met le repas dans la crédence : elles passent par la serrure. La femme suspend ses provisions au plafond : elles font un immense parcours le long des murs et des soliveaux, descendent le long des cordes et dévorent tout. La femme les brûle ou les empoisonne. Enfin, sûre de les avoir détruites, elle se croit tranquille. Ah ! Si elle ne veille pas, quelle surprise ! Voilà que sortent celles qui viennent de naître et tout est à recommencer. C’est ainsi tant qu’on vit. Il faut se surveiller pour extirper les mauvaises herbes dès qu’elles sortent, sinon elles forment un plafond de ronces et étouffent la graine. Les soucis mondains, la duperie des richesses créent cet enchevêtrement, asphyxient les plantes semées par Dieu et les empêchent de former l’épi.

Voici maintenant les champs pleins de cailloux. Combien y en a-t-il en Israël ! Ce sont ceux qui appartiennent aux “ fils des lois ”, comme l’a relevé très justement mon frère Jude. Il ne s’y trouve pas la pierre unique du Témoignage, ni la pierre de la Loi. Mais on y trouve toute la caillasse des petites lois humaines – bien pauvres – créées par les hommes. Elles sont si nombreuses que, par leur poids, elles ont formé une carapace même à la pierre de la Loi. C’est une ruine qui empêche tout enracinement de la semence. La racine n’est plus nourrie. Il n’y a plus de terre, plus de sucs nourriciers. L’eau fait pourrir la semence parce qu’elle stagne sur les pavés des sillons. Le soleil échauffe les sillons et brûle les petites plantes. Ce sont là les âmes de ceux qui ont remplacé la simple doctrine de Dieu par des doctrines humaines compliquées. Ils reçoivent, et même avec joie, ma parole. Sur le coup, elle les ébranle et les séduit. Mais ensuite… Il faudrait de l’héroïsme pour piocher jusqu’à débarrasser le champ, l’âme et l’esprit de toute la pierraille des rhéteurs. Alors la semence s’enracinerait et formerait un germe fort. Sinon… elle ne produit rien. Il suffit de la crainte de représailles humaines, il suffit d’une réflexion : “ Mais après cela ? Que me feront les puissants ? ” et la pauvre semence s’affaiblit, sans nourriture. Il suffit que toute la caillasse s’agite au son vain des centaines de préceptes qui se sont substitués au Précepte et voilà que l’homme périt avec la semence qu’il a reçue… Israël est rempli de telles personnes. Cela explique comment le cheminement vers Dieu va en sens inverse de celui de la puissance humaine.

Pour finir, les champs traversés par des sentiers, poussiéreux, nus, sont ceux des hommes du monde, égoïstes. Leur confort est leur loi, la jouissance est leur but. Ne pas se fatiguer, sommeiller, rire, manger… L’esprit du monde est roi en eux. La poussière de la mondanité recouvre le terrain, qui devient stérile. Les oiseaux, qui symbolisent la dissipation, se précipitent sur les mille sentiers qu’on a ouverts pour se faciliter la vie. L’esprit du monde – c’est-à-dire du Malin – dévore et détruit toute semence qui tombe sur ce terrain ouvert à toutes les sensualités et à toutes les légèretés.

180.7

Avez-vous compris ? Avez-vous autre chose à demander ? Non ? Alors nous pouvons aller nous reposer pour partir demain pour Capharnaüm. Je dois aller encore quelque part avant d’entre­prendre le voyage vers Jérusalem pour la Pâque.

– Passerons-nous encore par Arimathie ? demande Judas.

– Ce n’est pas sûr. Cela dépend des… »

On a frappé violemment à la porte.

« Mais qui cela peut-il être à cette heure ? » dit Pierre en se levant pour aller ouvrir.

C’est Jean qui se présente, bouleversé, couvert de poussière, avec des marques visibles de larmes sur le visage.

« Toi ici ? s’écrient-ils tous. Mais qu’est-il arrivé ? »

Jésus qui s’est levé dit seulement :

« Où est ma Mère ? »

Jean s’avance, va s’agenouiller aux pieds de son Maître en tendant les bras comme pour demander de l’aide, et dit :

« Ta Mère se porte bien, mais elle est en larmes comme moi, comme beaucoup de monde, et elle te prie de ne pas venir en longeant le Jourdain de notre côté. C’est pour cette raison qu’elle m’a renvoyé à toi, parce que… parce que Jean, ton cousin, a été fait prisonnier… »

Et Jean pleure, tandis que les disciples présents sont saisis d’émotion.

Jésus devient très pâle, mais ne se trouble pas. Il se contente de dire :

« Relève-toi et raconte.

– J’allais vers le sud avec ta Mère et les femmes. Isaac et Timon nous accompagnaient eux aussi : trois femmes et trois hommes. J’ai obéi à ton ordre de conduire Marie auprès de Jean… ah ! Tu savais bien que c’était le dernier adieu !… Que ce devait être le dernier adieu. Les orages des jours derniers nous ont obligés à nous arrêter quelques heures, mais cela a suffi pour que Jean ne puisse plus revoir Marie… Nous sommes arrivés à la sixième heure et il avait été capturé au chant du coq…

– Mais où ? Comment ? Par qui ? Dans sa grotte ? »

Tout le monde questionne, tous veulent savoir.

« Il a été trahi. On s’est servi de ton Nom pour le trahir !

– Quelle horreur ! Mais qui était-ce ? » crient-ils tous.

Frissonnant, Jean répond tout bas cette horreur que l’air lui-même ne devrait pas entendre :

« Par l’un de ses disciples… »

L’émotion est à son comble. Les uns maudissent, d’autres pleurent, d’autres, abasourdis, restent immobiles comme des statues.

180.8

Jean s’agrippe au cou de Jésus et s’écrie :

« J’ai peur pour toi ! Oui, pour toi, pour toi ! Les saints sont trahi par des traîtres qui se vendent pour de l’or, pour de l’or et par peur des grands, par l’appât d’une récompense, par… par soumission à Satan. Pour des milliers de raisons ! Oh, Jésus, Jésus, Jésus ! Quelle douleur ! Mon premier maître ! Mon Jean qui m’a donné à toi !

– Du calme ! Il ne m’arrivera rien pour le moment.

– Mais plus tard, plus tard ? Je me regarde… je les regarde, eux que voici… j’ai peur de tous, même de moi. Celui qui te trahira sera l’un de nous…

– Mais tu es fou ? Tu t’imagines que nous ne le mettrions pas en pièces ? » hurle Pierre.

Et Judas :

« Il est vraiment fou ! Moi, je ne trahirai jamais. Mais si je me sentais affaibli au point de pouvoir le faire, je me tuerais. Cela vaut mieux que d’être le meurtrier de Dieu. »

Jésus se dégage de l’étreinte de Jean et secoue rudement Judas en lui disant :

« Ne blasphème pas ! Rien ne pourra t’affaiblir à moins que tu n’y consentes. Et si cela arrivait, il te faudrait pleurer et ne pas commettre un crime qui s’ajoute au déicide. Devient faible celui qui rompt le lien vivant avec Dieu. »

180.9

Puis il se tourne vers Jean qui pleure, la tête appuyée sur la table :

« Exprime-toi avec ordre. Je souffre moi aussi. C’était mon sang et mon Précurseur.

– Je n’ai vu que ses disciples, une partie d’entre eux, consternés et furieux contre le traître. Les autres ont accompagné Jean à sa prison pour être auprès de lui à sa mort.

– Mais il n’est pas encore mort… La dernière fois, il a pu s’enfuir, dit Simon le Zélote qui aime beaucoup Jean, pour essayer de le réconforter.

– Il n’est pas encore mort, mais il mourra, répond Jean.

– Oui, il mourra. Il le sait, comme moi, je le sais. Rien ni personne ne le sauvera cette fois. Quand ? Je l’ignore. Je sais qu’il ne sortira pas vivant des mains d’Hérode.

– Oui, d’Hérode. Ecoute : il est allé vers cette gorge par laquelle nous sommes passés, nous aussi, en revenant en Galilée, entre les monts Ebal et Garizim, parce que le traître lui avait dit : “ Le Messie est mourant après avoir été assailli par des ennemis. Il veut te voir pour te confier un secret. ” Il est donc parti avec le traître et quelques autres. A l’ombre du vallon se trouvaient les soldats d’Hérode, qui se sont saisis de lui. Les autres se sont enfuis et ont porté la nouvelle aux disciples restés près d’Hennon. Ils venaient d’arriver quand je les ai rejoints avec ta Mère. Et ce qui est horrible, c’est que c’était un homme de notre région… et que ce sont les pharisiens de Capharnaüm qui sont à la tête du complot pour le capturer. Ils étaient allés le trouver en prétendant que tu avais été leur hôte et que, de là, tu étais parti pour la Judée… Il ne serait pas sorti de son refuge pour un autre que toi… »

180.10

Un silence de mort succède au récit de Jean. Jésus semble à bout : ses yeux d’un bleu très sombre sont comme embués. Il se tient la tête penchée, la main encore posée sur l’épaule de Jean et agitée par un léger tremblement. Personne n’ose parler.

Jésus rompt le silence :

« Nous irons en Judée par un autre chemin. Mais je dois aller à Capharnaüm demain, le plus tôt possible. Reposez-vous. Je monte dans les oliviers. J’ai besoin d’être seul. »

Il sort sans rien ajouter.

« Il va certainement pleurer, murmure Jacques, fils d’Alphée.

– Suivons-le, mon frère, dit Jude.

– Non, laissez-le pleurer. Seulement, sortons doucement et soyons à l’écoute. Je crains des pièges de tous côtés, répond Simon le Zélote.

– Oui, allons-y. Nous, les pêcheurs, allons sur le rivage : si quelqu’un vient du large, nous le verrons. Vous, parmi les oliviers. Il est sûrement à sa place habituelle, près du noyer. A l’aube, nous préparerons les barques pour partir au plus vite. Quelles vipères ! Eh ! Je l’avais bien dit, moi ! Dis, mon garçon, sa Mère est-elle bien en sûreté ?

– Oh oui ! Même les bergers disciples de Jean sont partis avec elle. André… nous ne le verrons plus, notre Jean !

– Tais-toi ! Tais-toi ! On dirait le chant du coucou… L’un précède l’autre et… et…

– Par l’Arche sainte ! Taisez-vous ! Si vous parlez encore de malheur au Maître, je commence par vous faire apprécier le goût de ma rame sur vos reins ! » crie Pierre, furieux.

« Quant à vous, dit-il ensuite à ceux qui restent parmi les oliviers, prenez des bâtons, de grosses branches. Il y en a là, dans le bûcher, et dispersez-vous avec vos armes. Le premier qui s’ap­proche de Jésus pour lui nuire, qu’on le tue.

– Les disciples ! Les disciples ! Il faut être prudent avec les nouveaux ! » s’exclame Philippe.

Le nouveau disciple se sent blessé et demande :

« Doutes-tu de moi ? C’est lui qui m’a choisi et voulu.

– Pas de toi, mais des scribes et des pharisiens, et de ceux qui les adorent. C’est de là que viendra la ruine, soyez-en sûrs. »

Ils sortent et s’éparpillent, les uns dans les barques, les autres dans les oliviers des collines, et tout prend fin.

180.1

We are in Peter’s kitchen once again. The meal must have been a hearty one because dishes with leavings of meat, fish, cheese dried fruit and honey cakes are being piled up on a kind of cupboard, which reminds me of our Tuscan kneading troughs. Pitchers and chalices are still on the table.

Peter’s wife must have worked miracles to satisfy her husband, and she must have worked all day. Now, tired but happy, she is in her little corner listening to what her husband and the others are saying. She watches her Simon, who, as far as she is concerned, must be a great man, even if he is somewhat exacting, and when she hears him speak new words, whereas before he could only talk of boats, nets, fish and money, she begins to blink as if she were dazzled by a bright light. Peter, both because of his joy in having Jesus at his table and because of the hearty meal he has had, is in the best of spirits this evening, and the future Peter, preaching to the crowds, is disclosed.

I do not know which remark of a companion originated the clearcut reply of Peter who says: «It will happen to them what happened to the founders of the Tower of Babel. Their own pride will provoke the collapse of their theories and they will be crushed.»

Andrew objects to his brother: «But God is Mercy. He will prevent the collapse to give them time to mend their ways.»

«Do not believe that. They will crown their pride with false accusations and persecutions. Oh! I can already see it. They will persecute us to disperse us as unpleasant witnesses. And since they attack the Truth by laying snares for it, God will take revenge and they will perish.»

«Shall we have the strength to resist?» asks Thomas.

«Well… as for me, I would not have it. But I put my trust in Him» and Peter nods to the Master Who is listening and is silent, His head slightly inclined, as if He wished to hide His understanding countenance.

«I think that God will not put us to tests beyond our strength» says Matthew.

«Or He will at least increase our strength in proportion to the tests» concludes James of Alphaeus.

«He is already doing that.

180.2

I was rich and powerful. If God had not decided to preserve me for a purpose of His, I would have surrendered myself to despair and perished when I was persecuted and a leper. I would have acted harshly against myself… Instead a new wealth, which I had never possessed before, descended upon my desolation: the wealth of a conviction: “God exists”. First… God… Yes, I believed, I was a faithful Israelite. But mine was a faith of formalism. And I thought that the reward of my faith was always inferior to my virtue. I took the liberty of debating with God because I felt that I was still something on the earth. Simon Peter is right. I, too, was building a tower of Babel[1] by praising myself and satisfying my ego. When everything collapsed around me and I was like a worm crushed by the weight of all this human futility, then I no longer debated with God, but with myself, with my stupid self and I ended up by demolishing it. And as I did so, by making room for what I think is the God immanent in our earthly beings, I gained a new strength and wealth: the certainty that I was not alone and that God was watching over man defeated by men and by evil.»

«According to you, what is God, “the God immanent in our earthly beings” as you said? What do you mean? I do not understand you and I think it is a heresy. God is the One we know through the Law and the Prophets. There is no other God» says rather sternly Judas of Kerioth.

«If John was here he would tell you better than I can. But I will tell you as best I can. God is the One we know through the Law and the Prophets. That is true. But in what do we know Him? And how?»

Judas of Alphaeus exclaims: «Little and badly. The Prophets, who described Him for us, knew Him. The idea we have is a muddled one, as we can just see through a mound of explanations piled up by sects…»

«Sects? What do you mean? We have no sects. We are the children of the Law. We all are» the angry aggressive Iscariot says.

«The children of the laws. Not of the Law. There is a slight difference. Plural, not singular. In actual fact, we are the children of what we created, no longer of what God gave us» retorts Thaddeus.

«The laws derive from the Law» says the Iscariot.

«Also diseases originate in our bodies, but that does not mean that they are good» replies Thaddeus.

«But let me hear what this immanent God of Simon Zealot is.» The Iscariot, who cannot argue against the remark of Judas of Alphaeus, endeavours to take the discussion back to where it started.

180.3

Simon Zealot says: «Our senses need a term to catch an idea. Each of us, I am referring to us believers, believes, by the virtue of faith, in the Most High Lord and Creator, Eternal God, Who is in Heaven. But every being needs more than such bare, pure, incorporeal faith, which is fit and sufficient for the angels who see and love God spiritually, as they share with Him a spiritual nature and can see God. We have to create a “picture” of God for ourselves, which picture is made with the essential features that we ascribe to God, to give a name to His infinite absolute perfection. The more a soul concentrates, the more it succeeds in achieving an exact knowledge of God. That is what I say: the immanent God. I am not a philosopher. Perhaps I have applied the word wrongly. In short, I think that the immanent God is to feel, to perceive God in our spirits, to feel and perceive Him no longer as an abstract idea, but as a real presence, bestowing strength and a new peace upon us.»

«All right. But, to sum up, how did you feel Him? What is the difference between feeling by faith and feeling by immanence?» asks the Iscariot somewhat ironically.

«God is safety, boy. When you perceive Him, as Simon says, by means of that word, which I do not understand literally, but I understand its spirit — and believe me, the trouble is that we understand only literally and we do not understand the spirit of God’s words — it means that you are able to grasp the idea of the terrible majesty, but also of the most sweet paternity of God. It means that, should all the world judge and condemn you unjustly, you would feel that One only, He, the Eternal One, Who is your Father, does not judge you, but absolves and comforts you. It means that if all the world should hate you, you would feel over you a love greater than any this world can offer. It means that if you were isolated in jail or in a desert you would always hear One speak to you and say: “Be holy, that you may be like your Father”. It means that for the true love for this Father and God, Whom at last you perceive as such, you accept, work, take and leave without any human consideration, as you are concerned only to return love for love and to copy God as much as possible in your actions» says Peter.

«You are proud! To copy God! You are not entitled to» declares the Iscariot.

«It is not pride. Love leads to obedience. To copy God seems to me a form of obedience because God said that He made us in His own image and likeness» replies Peter.

«He made us. We must not go higher up.»

«You are a poor wretch, my boy, if that is what you think! You are forgetting that we fell and that God wants to take us back to what we were.»

180.4

Jesus begins to speak: «Even more, Peter, Judas and you all. Even more than that. Adam’s perfection was still susceptible of improvement through love, which would have made him a more precise image of his Creator. Adam without the stain of sin would have been a most shining mirror of God. That is why I say: “Be perfect as your Father Who is in Heaven is perfect”. Like your Father. Therefore like God. Peter is quite right. And so is Simon. I ask you to remember their words and apply them to your souls.»

Peter’s wife almost faints from joy on hearing her husband being praised thus. She weeps behind her veil: she is quiet but happy.

Peter blushes so much that he seems to be having a stroke of apoplexy. He remains dumb for a few moments, then says: «Well, then, give me my reward. The parable of this morning…»

Also the others join Peter saying: «Yes, You promised. Parables serve very well to make people understand the comparison. But we know that they have a higher meaning than the comparison.

180.5

Why do You speak to them in parables?»

«Because they are not to understand more than I explain. You are granted much more, because as My disciples, you must be acquainted with the mystery; and you are therefore given to understand the mysteries of the Kingdom of Heaven. That is why I say to you: “Ask Me if you do not understand the spirit of the parable”. You give everything and everything is given to you, that you, in your turn, may give everything. You are giving everything to God: love, time, interests, freedom, lives. And God gives you everything to reward you and to enable you to give everything in the name of God to those who come after you. Thus, to him who has given will be given abundantly. But he who gave only partly or did not give at all, will be deprived also of what he has.

I speak to them in parables, so that, while seeing, they may see only what is illuminated by their will to adhere to God, and while listening, always through the same will of adherence, they may hear and understand. See! Many hear My word, few adhere to God. Their spirits lack goodwill. Isaiah’s prophecy[2] is fulfilled in them: “You will hear with your ears and will not understand, you will look with your eyes and will not see”. Because these people are hard-hearted; their ears are hard and their eyes are closed, so that they may not see and hear, that they may not understand with their hearts and convert, that I may cure them. But you are blessed because your eyes see and your ears hear, and because of your goodwill! I solemnly tell you that many Prophets and many just people were anxious to see what you see and they did not see it, and to hear what you hear and they did not hear it. They pined away with the desire to understand the mystery of the words, but as soon as the light of the prophecy went out, the words remained like burnt out coals, also for the holy man who had received them.

Only God reveals Himself. When His light fades out, as soon as the purpose of illuminating the mystery comes to its end, the inability to understand envelops the regal truth of the word received, like the bandages of a mummy. That is why I said to you this morning: “The day will come when you will find everything I have given you”. Now you cannot remember. But later light will come upon you, not just for a moment, but for an inseparable union of the Eternal Spirit with yours, whereby your teaching concerning what pertains to the Kingdom of God will be infallible. And what applies to you, will also apply to your successors, if they live of God as of one bread only.

180.6

Now listen to the spirit of the parable.

We have four kinds of fields: the fertile ones, the thorny ones, the stony ones and the ones full of paths. We also have four types of spirits.

There are the honest spirits, the spirits of goodwill, prepared by their own will and by the work of an apostle, of a “true” apostle; because there are apostles who have the name but not the spirit of an apostle and they are more lethal for the will in formation, than birds, thorns and stones, They upset in such a way, through their intolerance, their haste, their reproaches and their threats, as to drive people away from God forever. There are others who, on the contrary, through an excess of benignity, utterly out of place, cause the seed to rot in too soft a soil. Because of their lack of vigour, they kill the vigour of the souls they cure. But let us consider true apostles, that is, the shining mirrors of God. They are paternal, merciful, patient, and at the same time they are strong, as their Lord is strong. Now: the souls prepared by them and by their own will can be compared to the fertile fields, free from stones and brambles, from couch-grass and darnel, in which the word of God thrives and every word, that is every seed, bears a bundle of ears, yielding in some places one hundred, in others sixty per cent. Are there any like that among those who follow Me? There certainly are. And they will be holy. They come from all castes and countries. And there are Gentiles among them and they will yield one hundred per cent because of their goodwill, only because of that, or because of their goodwill and that of an apostle or disciple who prepares them for Me.

The thorny fields are those in which thorny tangles of personal interests, which suffocate the good seed, have been allowed to grow by carelessness. You must watch yourselves all the time. Never say: “Oh! I am well formed, I have been sown, I can rest assured that I will bear seeds of eternal life”. Watch yourselves; the struggle between Good and Evil is still on. Have you ever watched a colony of ants that install themselves in a house? There they are, near the fireplace. The housewife takes all foodstuff away from there and puts it on the table. They sniff the air and attack the table. The housewife puts the food in a cupboard and they get into the cupboard through the keyhole. The woman hangs her food supply from the ceiling, and they go a long way along walls and beams, down the rope and reach the food. The woman burns them, scalds them, poisons them. And thinking that she has destroyed them she is happy. But if she does not watch, what a surprise she gets! The new hatched ones come out and she has to start all over again. And that is what happens while you live; you must be careful and uproot the evil weeds as soon as they come up. Otherwise they will form a ceiling of brambles which suffocate the corns. Worldly cares, deceiving wealth form the tangle, suffocate the seed of God and prevent it from coming into ears.

And here are the fields full of stones. How many there are in Israel! They are the ones that belong to the “children of the laws” as My cousin Judas quite rightly said. In them there is not the one Stone of Witness, nor the Stone of the Law. There is the quarry poor petty human laws made by men. They are so many that with their weight they have broken also the Stone of the Law into chips. A disaster which does not allow the seed to take root. The root is no longer nourished because there is neither soil nor sap. The water stagnating on the stone pavement causes the seed to rot, the sun makes the stones hot and parches the little plants. Such are the spirits of those who put complicated human doctrines in place of the simple doctrine of God. They even receive My word with joy. At first it shakes and allures them. But later… They would need to be heroes and work hard to clean the field, their souls and minds of all rhetorical stones. The seed would then take root and bear long spikes. As it is… it bears nothing. The fear of human retaliation is enough. It is enough to say: “And after? What will the mighty ones do to me?” and the poor seed languishes without nourishment. It is enough for the whole quarry to stir with the vain sound of the hundreds of precepts, which have been put in place of the Precept, that man perishes with the seed received.. Israel is full of them. That explains why the coming to God is in inverse ratio to human power.

The last are the dusty barren fields full of roads. Those of worldly selfish people. Their comfort is their law, enjoyment their aim. Their ambitions: to do no work, to slumber, to enjoy themselves, to feast… The spirit of the world is their king. The dust of worldliness covers the soil which becomes mouldy. Birds, that dissipation, rush onto the thousand paths which have been built to make life easier. The spirit of the world, that is, of the Evil one, picks up and destroys all the seed that falls on this soil open to all sensuality and laxity…

180.7

Have you understood? Have you any questions to ask? No? In that case we can go and rest and tomorrow we will leave for Capernaum. There is one place to which I must go before starting on My journey to Jerusalem for Passover.»

«Shall we go through Arimathea again?» asks the Iscariot.

«I am not sure. It depends on…»

There is a loud knocking at the door.

«Who can it be at this time?» asks Peter getting up to open the door.

John comes in. He is most upset, covered in dust, and he has obviously been weeping.

«You are here!» they all shout. «What’s the matter?»

Jesus, Who has stood up, says only: «Where is My Mother?»

And John, coming forward and kneeling at the feet of the Master, holding his arms as if he were asking for help, says: «Your Mother is well, but She is weeping as I am, as many others are, and She begs You not to come following the Jordan on our side. That is why She sent me back, because Your cousin John has been captured…» And John weeps while everybody is bewildered.

Jesus turns very pale but does not become excited. He only says:

«Stand up and tell us.»

«I was going down with Your Mother and the other women. Isaac and Timoneus were also with us. We were three women and three men. I was carrying out Your instruction to take Mary to John… Ah! You knew it was their last farewell!… It was to be their last farewell… Because of the storm of a few days ago, we had to stop for a little while. But it was enough to make it impossible for John to see Mary… We arrived at noon and he had been captured at daybreak…»

«Where? How? By whom? In his cave?» they all ask, they all want to know.

«He was betrayed!… They used Your name to betray him!» «How horrible! Who did that?» they all shout.

And John shuddering, whispering in a low voice what not even the air should hear, states: «It was one of his disciples…»

The confusion is at its highest pitch. Some curse, some weep, some are petrified with astonishment.

180.8

John throws his arms around Jesus’ neck and shouts: «I am afraid for You!… for You! The saints have their traitors who sell themselves for gold and for fear of the mighty ones, yearning for reward, obeying Satan. For thousands of things! Oh! Jesus! Jesus! How dreadful! My first master! My John who gave me to You!»

«It is all right! Do not worry! Nothing will happen to Me for the time being.»

«But later? What will happen later? I look at myself, at these… I am afraid of everybody, also of myself. Will one of us be Your traitor?…»

«Are you mad? And do you think that we would not tear him to pieces?» shouts Peter.

And the Iscariot: «Oh! You really are mad! It will never be I! But if I should feel so weak as to eventually become so, I would kill myself. Better than be the murderer of God.»

Jesus frees Himself from John’s grip, shakes Judas violently saying: «Do not swear! Nothing can make you weak, unless you want! And if that should happen, make sure you weep for it, and do not commit another crime in addition to deicide. He becomes weak who cuts off his vital link with God.»

180.9

He then returns to John, who is weeping with his head on the table and he says: «Speak calmly. It grieves Me, too. He was of My blood and was My Precursor.»

«I only saw some of the disciples, who were dismayed and furious with the traitor. The others accompanied John towards his prison to be near him at his death.»

«But he is not dead yet… the last time he managed to escape.» says the Zealot endeavouring to comfort John of whom he is very fond.

«He is not dead yet. But he will die» replies John.

«Yes, he will die. He knows as well as I do. Nothing and no one will save him this time. When? I do not know. I know that he will not come out of Herod’s hand alive.»

«Yes, Herod. Listen. John went to the mountain gorge, between Mount Ebal and Gerizim, where we also passed coming back from Galilee, because the traitor said to him: “The Messiah is dying after being attacked by His enemies. He wants to see you to entrust a secret to you”. And he went with the traitor and some other people. Herod’s armed men were in the shade of the valley and they captured him. The others ran away and gave the news to the disciples who had remained near Hennon. They had just come when I arrived with Your Mother. And the dreadful thing is that he was one from our towns… and that the Pharisees of Capernaum are the leaders of the plot to catch him. They went to John saying that You had been their guest and that You were leaving from there to go to Judaea… he would not have left his refuge but for You…»

180.10

Dead silence follows John’s report. Jesus looks bloodless, His deep blue eyes are dimmed. He is standing with his head bowed, His hand still on John’s shoulder, and His hand is trembling lightly. No one dare speak. Jesus breaks the silence: «We shall go to Judaea following a different route. But I must go to Capernaum tomorrow. As early as possible. Rest now. I am going up to the olive-grove. I need to be alone.» And He goes out without saying anything else.

«He is certainly going to weep» whispers James of Alphaeus.

«Let us follow Him, brother» says Judas Thaddeus.

«No. Let Him weep. But let us go out quietly and keep watch. I fear tricks everywhere» replies the Zealot.

«Yes, let us go. We fishermen to the shore. If anybody comes from the lake we will see him. You go to the olive-grove. He is certainly in the usual place, near the walnut-tree. At dawn we will have the boats ready to go away early. Those snakes! Ehi! I did tell you! Tell me, boy? But… is His Mother really safe?»

«Oh! Yes! The shepherd disciples of John have also gone with Her. Andrew… we will never see our John again!»

«Be quiet! It sounds like the song of the cuckoo… One precedes the other and… and…»

«By the Holy Ark! Be quiet! If you go on talking about misfortunes to the Master, I will start from you, letting your backs feel the weight of my oar!» shouts an enraged Peter. «You…» he then says to those who are to go to the olive-grove: «Get some clubs, some big branches, you will find some in the wood-shed… and spread out, armed with them. The first one to come near Jesus to harm Him, kill him.»

«The disciples! We must be careful with the new ones!» exclaims Philip.

The new disciple feels hurt and asks: «Are you in doubt about me? He chose me and wanted me.»

«Not about you. I mean the scribes and Pharisees and their worshippers. That is where the trouble will come from, believe me.»

They go out, some towards the boats, some towards the olive-trees on the hills, and it all ends.


Notes

  1. la tour de Babel, dont nous pouvons lire l’histoire en : Gn 11, 1-9.
  2. prophétie qui se trouve en : Is 6, 9-10.
  3. s’ils vivent de Dieu comme unique pain : cette condition mise à l’infaillibilité pontificale doit avoir suscité une objection de la part du Père Migliorini, auquel Maria Valtorta a transmis cette réponse de Jésus (datée du 30 juin 1945). Nous en rapportons les passages principaux : […] Jésus me répondit : “ […] Il est vrai que l’infaillibilité du pape dans le domaine spirituel est une vérité définie. Elle existe en chacun de mes vicaires, indépendamment de sa forme de vie et de son degré de vertu. Mais il est tout aussi vrai que vous ne pourrez trouver un dogme défini et proclamé par des papes qui soient – de manière notoire ou non – privés de ma grâce. L’âme qui n’est pas en état de grâce ne peut être dans l’amitié de l’Esprit Saint. […] Appuyez-vous donc sur cette certitude : les dogmes sont vrais et l’infaillibilité existe parce que je n’accorde pas de dogmes à ceux qui ne le méritent pas. C’est ce qui était inclus dans la phrase qui a suscité l’objection […]. ” On retrouve la même idée dans ces mots de Jésus à l’apôtre Jacques, fils d’Alphée, en 258.6 : “ Dieu accordera sa lumière en fonction du degré que vous aurez atteint. Dieu ne laissera pas la lumière vous manquer, à moins que le péché ne vienne éteindre la grâce en vous. ”

Notes

  1. tower of Babel, in Genesis 11:1-9.
  2. prophecy in Isaiah 6:9-10.