The Writings of Maria Valtorta

565. Samuel est troublé par Judas, qui ne comprend pas

565. Samuel distressed by Judas Iscariot who does

565.1

Je vois encore Jésus avancer lentement dans l’épaisse forêt, à l’ouest d’Ephraïm. Il est seul et plongé dans ses pensées. Du torrent monte le gargouillis de l’eau, et des arbres proviennent des chants d’oiseaux. La vive lumière du soleil printanier répand sa douceur sous l’enchevêtrement des branches, et la marche est silencieuse sur le tapis d’herbes luxuriantes. Les rayons du soleil dessinent un tableau mobile de disques ou de rayures dorées sur la verdure de l’herbe, et quelque fleur encore couverte de rosée, frappée en plein fouet par un disque de lumière alors que l’ombre règne tout autour, resplendit comme si ses pétales étaient des pierres précieuses.

Jésus monte vers un escarpement qui s’avance comme un bal­con au-dessus du vide. Il s’y dresse un chêne colossal. Des branches flexibles de mûrier sauvage ou d’églantier, de lierre et de chèvrefeuille manquant de place et de point d’appui sur cette plateforme trop resserrée pour leur exubérante vitalité, se renversent dans le vide comme une chevelure ébouriffée et dénouée, et se tendent dans l’espoir de pouvoir s’accrocher à quelque tuteur.

Voilà Jésus parvenu à la hauteur de l’escarpement. Il se dirige vers la pointe la plus avancée, en écartant l’enchevêtrement des buissons. Une bande d’oiseaux s’enfuient dans un froufrou d’ailes et avec des cris effrayés.

565.2

Jésus s’arrête pour observer l’homme qui l’a précédé là-haut : à plat ventre sur l’herbe, presque au bord du précipice, et, les coudes appuyés au sol, le visage posé sur les mains, il regarde dans le vide, vers Jérusalem. C’est Samuel, l’ancien élève de Jonathas ben Uziel. Il est pensif, il soupire, il hoche la tête…

Jésus secoue des branches pour attirer son attention et, comme sa tentative est vaine, il ramasse dans l’herbe un gros caillou et le fait rouler en bas du sentier.

Le bruit de la pierre, qui rebondit sur la pente, fait sursauter le jeune homme, qui se retourne, l’air supris :

« Qui est là ?

– Moi, Samuel. Tu m’as précédé à l’un de mes endroits préférés de prière, dit Jésus en apparaissant de derrière le tronc puissant du chêne placé à la limite du sentier, et il le fait comme s’il venait d’arriver là.

– Oh ! Maître ! J’en suis désolé… Mais je vais te laisser tout de suite la place ! »

Samuel se lève en hâte et ramasse son manteau, qu’il avait enlevé pour l’étendre sous lui.

« Non, pourquoi ? Il y a de la place pour deux. L’endroit est si beau, ainsi isolé, solitaire, suspendu au-dessus du vide, avec tant de lumière et l’horizon par devant ! Pourquoi veux-tu le quitter ?

– Mais… pour te laisser prier…

– Et ne pouvons-nous pas le faire ensemble, ou même méditer, en parlant, en élevant notre esprit vers Dieu et, sans plus tenir compte des hommes et de leurs défauts, en pensant à Dieu notre Père et le bon Père de tous ceux qui le cherchent et l’aiment avec bonne volonté ? »

Samuel fait un geste de surprise quand Jésus dit : “ sans plus tenir compte des hommes et de leurs défauts… ” mais il ne réplique pas, et retourne à sa place.

565.3

Jésus s’assied à côté de lui sur l’herbe et reprend :

« Installe-toi ici et restons ensemble. Vois comme l’horizon est limpide aujourd’hui. Si nous avions des yeux d’aigles, nous pourrions voir les villages sur les sommets des monts qui entourent comme une couronne Jérusalem. Peut-être même verrions-nous un point resplendissant dans l’air comme une pierre précieuse qui ferait battre notre cœur : les dômes dorés de la Maison de Dieu… Regarde : là se trouve Béthel. On distingue ses maisons blanches, et là-bas, au-delà de Béthel, se trouve Bérot. Quelle fourberie subtile est celle des anciens habitants de l’endroit et de ses environs ! Mais la tromperie a beau n’être jamais une bonne arme, il en est résulté du bien, puisqu’elle les a mis au service du vrai Dieu. Il faut toujours abandonner les honneurs humains pour acquérir la proximité du divin, même si les honneurs humains étaient nombreux et de grande valeur, et la proximité du divin humble et inconnue. N’est-ce pas ?

– Oui, Maître, tu parles bien. C’est exactement ce qui m’est arrivé.

– Mais tu es triste, alors que ton changement devrait te réjouir. Tu es triste, tu souffres, tu t’isoles, tu regardes vers les lieux que tu as quittés. Tu as l’air d’un oiseau prisonnier qui, serré contre les barreaux de sa prison, regarde avec regret le lieu qu’il a aimé. Je ne te dis pas de ne pas le faire : tu es libre. Tu peux t’en aller et…

– Seigneur, Judas t’a peut-être parlé en mal de moi pour que tu t’adresses à moi de cette façon ?

– Non. Judas ne m’a rien dit. Ce n’est pas à moi qu’il a parlé, mais à toi. Et c’est la raison pour laquelle tu es triste et tu t’isoles, pris par le découragement.

– Seigneur, si tu connais cela sans que personne te l’ait relaté, tu sauras aussi que, si je suis triste, ce n’est pas par désir de te quitter, par repentir de m’être converti, par nostalgie du passé… et pas davantage par peur des hommes, cette peur de leurs châtiments que l’on voudrait m’insinuer.

565.4

Je regardais dans cette direction, c’est vrai. Je regardais vers Jérusalem, mais pas poussé par quelque désir d’y retourner — d’y retourner comme j’étais auparavant —. Y retourner comme tout israélite aime à entrer dans la Maison de Dieu et à adorer le Très-Haut, j’en ai certainement le désir, comme nous tous, et je ne crois pas que tu puisses me le reprocher.

– Moi, tout le premier, dans ma double Nature, je désire cet autel, et je voudrais le voir entouré de sainteté comme il convient. En tant que Fils de Dieu, tout ce qui lui rend honneur a pour moi une voix pleine de douceur, et en tant que Fils de l’homme, en tant qu’israélite, et par conséquent Fils de la Loi, je considère le Temple et l’autel comme le lieu le plus sacré d’Israël, celui où notre humanité peut s’approcher du Divin et se parfumer dans l’atmosphère qui entoure le trône de Dieu. Je ne supprime pas la Loi, Samuel. Elle m’est sacrée parce que donnée par mon Père. Je la perfectionne et j’y ajoute des parties nouvelles. Etant le Fils de Dieu, je puis le faire. C’est pour cela que le Père m’a envoyé. Je viens fonder le Temple spirituel de mon Eglise, et contre ce Temple ni hommes ni démons ne prévaudront. Mais les tables de la Loi n’y auront pas qu’une place d’honneur, car elles sont éternelles, parfaites, intouchables. Le “ ne pas faire tel ou tel péché ” ordonné dans ces tables, qui contiennent dans leurs brièveté lapidaire tout ce qu’il faut pour être juste aux yeux de Dieu, n’est pas supprimé par ma parole. Au contraire, je vous répète moi aussi ces dix commandements. Seulement, je vous demande de les observer avec perfection, c’est-à-dire non pas par peur de la colère de Dieu contre ses transgresseurs, mais par amour pour votre Dieu qui est Père. Je viens mettre votre main de fils dans celle de votre Père. Depuis tant de siècles, ces mains sont séparées ! Le châtiment séparait et la Faute aussi. Une fois venu le Rédempteur, voilà que le péché va être annulé. Les barrières tombent, vous êtes de nouveau les enfants de Dieu.

– C’est vrai. Tu es bon et tu réconfortes, toujours. Et tu sais. Je ne te dirai donc pas mon angoisse.

565.5

Mais je te demande : pourquoi les hommes sont-ils si pervers, si fous, si stupides ? Comment, quels procédés ont-ils pour pouvoir si diaboliquement suggérer le mal ? Et nous, comment sommes-nous aveugles au point de ne pas voir la réalité et de croire à leurs mensonges ? Comment pouvons-nous devenir de tels démons, et le rester quand on est près de toi ? Je regardais là-bas, et je pensais… Oui, je pensais aux nombreux ruisseaux de poison qui sortent de là pour troubler les enfants d’Israël. Je me demandais comment la sagesse des rabbis peut s’allier à tant de perversité, qui altère la vérité pour induire en erreur. Je pensais, surtout cela, parce que… »

Samuel, qui avait parlé avec fougue, s’arrête et baisse la tête. Jésus termine la phrase :

« … parce que Judas, mon apôtre, est ce qu’il est ; il me peine, moi, mais aussi ceux qui m’entourent ou viennent à moi, comme tu es venu. Je le sais. Judas essaie de t’éloigner d’ici et t’adresse des insinuations et des railleries…

– Et pas qu’à moi ! Oui, il a empoisonné ma joie d’être entré dans la justice. Il me l’empoisonne avec un tel art que je pense être ici comme un traître pour toi et pour moi. Pour moi, parce que j’ai l’illusion d’être meilleur, alors que je serai cause de ta ruine. En effet, je ne me connais pas encore… et je pourrais, en rencontrant ceux du Temple, renoncer à ma résolution et être… Oh ! si je l’avais fait auparavant, j’aurais eu l’excuse de ne pas te connaître pour ce que tu es, car je savais de toi uniquement ce qu’on me rapportait, pour faire de moi un maudit. Mais si je le faisais maintenant ! Quelle sera la malédiction de celui qui trahira le Fils de Dieu ! C’est pourquoi j’étais ici… pensif, oui. Je me demandais où fuir pour me sauver de moi-même et d’eux. Je pensais fuir en quelque lieu lointain pour me joindre à la Diaspora… Au loin, au loin, pour empêcher le démon de me faire pécher… Il a raison, ton apôtre, de se méfier de moi. Lui me connaît, car il nous connaît tous, en connaissant les chefs… Et il a raison de douter de moi. Quand il insinue : “ Tu ignores donc qu’il nous annonce lui-même que nous serons faibles ? Réfléchis bien : il y a d’un côté nous, les apôtres, qui sommes avec lui depuis si longtemps. De l’autre côté toi, empoisonné comme tu l’es par le vieil Israël, qui viens juste d’arriver, et cela à un moment qui nous fait trembler, tu crois avoir la force de te garder juste ? ” Il a raison de dire cela. »

L’homme, découragé, baisse la tête.

565.6

« Que d’accablement les fils de l’homme savent se causer ! En vérité, Satan sait se servir de cette tendance pour les terroriser tout à fait et les séparer de la Joie qui vient à leur rencontre pour les sauver. Car la tristesse de l’esprit, la peur du lendemain, les préoccupations sont toujours des armes que l’homme remet entre la main de son adversaire. Celui-ci l’effraie avec les fantômes mêmes que l’homme se crée. Certains vont jusqu’à s’allier à Satan pour l’aider à épouvanter leurs frères. Mais, mon fils, n’y a-t-il donc pas un Père dans le Ciel ? Un Père qui pourvoit pour ce brin d’herbe dans cette fissure de la roche — cette fissure remplie de terreau, disposée de telle façon que l’humidité des rosées, en glissant sur la pierre lisse, se recueille dans ce petit sillon, pour que le brin puisse vivre et fleurir avec cette minuscule fleur, dont la beauté n’est pas moins admirable que celle du grand soleil qui resplendit là-haut : l’un et l’autre sont des œuvres parfaites du Créateur. Si donc le Père veille sur ce brin d’herbe poussé sur une roche, pourrait-il ne pas prendre soin de l’un de ses enfants qui veut fermement le servir ? Ah ! en vérité, Dieu ne déçoit pas les “ bons ” désirs de l’homme, car c’est lui-même qui les allume dans votre cœur. Dans sa prévoyance et sa sagesse, c’est lui qui crée les circonstances qui vont favoriser le désir de ses enfants, et non seulement cela, mais aussi redresser et perfectionner un désir de l’honorer qui a pris des voies imparfaites, pour l’amener à prendre le bon chemin. Tu étais parmi ceux-ci. Tu croyais, tu voulais, tu étais convaincu d’honorer Dieu en me persécutant. Le Père a vu que, dans ton cœur, il n’y avait pas de haine pour Dieu, mais une aspiration à lui rendre gloire en retirant du monde Celui que les membres du Sanhédrin t’avaient désigné comme l’ennemi de Dieu et le corrupteur des âmes. Il a donc suscité les circonstances favorables pour exaucer ton désir de rendre gloire à ton Seigneur. Et voilà que tu es parmi nous. Peux-tu imaginer que Dieu t’abandonne, maintenant qu’il t’a amené ici ? C’est seulement si, toi-même, tu l’abandonnes que la force du mal pourra te dominer.

– Je ne souhaite pas cela. Ma volonté est sincère ! proclame Samuel.

– Dans ce cas, de quoi te préoccupes-tu donc ? De la parole d’un homme ? Laisse-le parler. Il pense avec ce qu’il est, or une pensée humaine est toujours imparfaite.

565.7

Mais je vais y pourvoir.

– Je ne voudrais pas que tu lui fasses des reproches. Il me suffit que tu m’assures que je ne pécherai pas.

– Je te l’assure. Il ne t’arrivera rien, parce que tu refuses que cela t’arrive. Car, tu vois, mon fils, il ne te servirait à rien d’aller dans la Diaspora, et même au bout du monde, pour préserver ton âme de la haine envers le Christ et du châtiment mérité. Beaucoup en Israël ne se souilleront pas matériellement du Crime, mais ne seront pas moins coupables que ceux qui me condamneront et exécuteront la sentence. Avec toi, je puis parler de ces choses, car tu sais déjà que tout est disposé dans ce but. Tu connais le nom et la pensée des plus acharnés contre moi. Tu l’as dit : “ Judas nous connaît tous, car il connaît tous les chefs. ” Mais si lui vous connaît, même vous, qui jouez un moindre rôle — vous êtes comme de petites étoiles en face des planètes de grande taille —, vous savez tout autant ce que l’on prépare, comment on s’y prend, qui est à l’œuvre, quels complots on mijote, quels moyens on étudie… Je peux donc parler avec toi. Cela me serait impossible avec les autres… Les autres ne savent pas souffrir et compatir comme moi…

– Maître, mais comment peux-tu, le sachant, être ainsi…

565.8

Mais qui monte par le sentier ? »

Samuel se lève pour regarder. Il s’écrie :

« Judas !

– Oui, c’est moi. On m’a dit que le Maître si est dirigé par ici, mais c’est toi que je trouve ! Je retourne donc sur mes pas pour te laisser à tes pensées. »

Et il émet son petit rire, plus lugubre que la plainte d’une chouette, tant il manque de sincérité.

« Moi aussi, je suis là. On me demande au village ? dit Jésus en apparaissant derrière Samuel.

– Toi ! Tu étais en bonne compagnie, Samuel ! Et toi aussi, Maître…

– Oui, la compagnie d’une personne qui embrasse la justice est toujours bonne. Tu me cherchais pour rester avec moi ? Alors viens. Il y a de la place pour toi, comme pour Jean s’il était avec toi.

– Il est en bas, occupé avec d’autres pèlerins.

– S’il y a des pèlerins, il va me falloir rentrer.

– Non, ils restent toute la journée de demain. Jean est en train de les installer dans nos lits pour leur séjour.

565.9

Il est heureux de le faire. D’ailleurs, tout le réjouit. Vous vous ressemblez vraiment, et je ne sais pas comment vous faites pour être toujours heureux, même pour ce qu’il y a de plus… affligeant.

– C’est cette question que j’allais poser quand tu es arrivé ! s’écrie Samuel.

– Ah oui ! Toi aussi, alors, tu ne te sens pas heureux, et tu t’étonnes que d’autres, dans des conditions encore plus… difficiles que les nôtres, puissent l’être.

– Je ne suis pas malheureux, je ne parle pas pour moi. Mais je me demande de quelle source vient la sérénité du Maître, qui n’ignore pas son avenir, et que pourtant rien ne trouble.

– Mais d’une source céleste ! C’est naturel ! Il est Dieu ! Tu en doutes peut-être ? Un Dieu peut-il souffrir ? Il est au-dessus de la douleur. L’amour du Père est pour lui comme… comme un vin enivrant. Un vin enivrant est pour lui la conviction que ses actes… servent au salut du monde. D’ailleurs… peut-il avoir les réactions physiques que nous, humbles hommes, nous avons ? Cela est contraire au bon sens. Si Adam innocent ne connaissait aucune espèce de douleurs, et ne les aurait jamais connues s’il était resté innocent, Jésus le… super-innocent, la créature… je ne sais comment la qualifier : incréée puisqu’elle est Dieu, ou créée puisqu’elle a des parents… oh ! que de “ questions ” insolubles pour les hommes à venir, mon Maître ! Si Adam fut exempt de la douleur en raison de son innocence, peut-on imaginer que Jésus ait à souffrir ? »

Jésus garde la tête penchée. Il s’est assis de nouveau sur l’herbe. Ses cheveux voilent son visage. Je ne vois donc pas son expression. Samuel et Judas, eux, sont debout et se font face.

Samuel réplique :

« Mais s’il doit être le Rédempteur, il doit réellement souffrir. Tu ne te rappelles pas David et Isaïe ?

– Je me les rappelle, évidemment ! Mais eux, tout en reconnaissant la figure du Rédempteur, ne voyaient pas le secours immatériel que le Rédempteur allait obtenir pour être… disons : torturé, sans ressentir de douleur.

– Et quel secours ? Une créature pourra aimer la souffrance, ou la subir avec résignation, selon sa perfection de justice. Mais elle la sentira toujours. Autrement… si on n’éprouvait rien… ce ne serait pas une souffrance.

– Jésus est Fils de Dieu.

– Mais ce n’est pas un fantôme ! C’est une vraie chair ! La chair souffre si elle est torturée. C’est un homme véritable ! La pensée de l’homme souffre s’il est offensé et si on fait de lui un objet de mépris.

– Son union avec Dieu estompe en lui les sensations humaines. »

565.10

Jésus relève la tête et prend la parole :

« En vérité je te dis, Judas, que je souffre et souffrirai comme tout homme, et plus que tout homme. Mais je peux être heureux malgré cela, de la sainte félicité spirituelle de ceux qui ont obtenu la libération des tristesses de la terre pour avoir embrassé la volonté de Dieu comme leur unique épouse. Si je le peux, c’est parce que j’ai dépassé le concept humain du bonheur, la quête inquiète du bonheur, tel que les hommes se le représentent. Je ne recherche pas ce qui, selon l’homme, constitue le bonheur ; mais je mets ma joie en ce qui est précisément à l’opposé de ce que l’homme poursuit. Ce que l’homme fuit et méprise, parce qu’il le considère comme un fardeau et un mal, représente pour moi ce qu’il y a de plus doux. Je ne regarde pas l’heure, mais les conséquences que l’heure peut créer dans l’éternité. Mon épisode cesse, mais son fruit dure. Ma souffrance a une fin, mais les mérites de cette souffrance n’ont pas de fin. Du reste, que ferais-je d’un moment de “ bonheur ” tel qu’on le considère sur la terre, un moment atteint après une poursuite de plusieurs années, si ensuite ce moment ne pourrait m’accompagner dans l’éternité en tant que joie, et quand j’aurais dû en profiter pour moi seul, sans en faire part à ceux que j’aime ?

– Mais si tu triomphais, une partie de ta félicité nous reviendrait, à nous qui te suivons ! s’écrie Judas.

– Vous ? Qu’êtes vous en comparaison des multitudes passées, présentes et à venir, auxquelles ma souffrance procurera la joie ? Je vois bien au-delà de la félicité terrestre. Je plonge mon regard au-delà, dans le surnaturel. Je vois ma douleur se changer en joie éternelle pour une foule de créatures. Et j’embrasse la souffrance comme la plus grande force pour atteindre la félicité parfaite, qui est celle d’aimer le prochain jusqu’à souffrir pour lui donner la joie. Jusqu’à mourir pour lui.

– Je ne comprends pas cette félicité, déclare Judas.

– Tu n’es pas encore sage, autrement tu la comprendrais.

– Et Jean l’est ? Il est plus ignorant que moi !

– Humainement, oui. Mais il possède la science de l’amour.

– D’accord. Mais je ne crois pas que l’amour empêche les bâtons d’être des bâtons et les pierres d’être des pierres et de faire souffrir les chairs qu’ils frappent. Tu dis toujours que la douleur t’est chère, parce qu’elle est pour toi amour. Mais quand tu seras réellement pris et torturé, si toutefois c’est possible, je ne sais pas si tu auras le même avis. Pense à cela pendant que tu peux fuir la souffrance. Elle sera terrible, tu sais ? Si les hommes peuvent te capturer… ils n’auront pas d’égards pour toi ! »

Jésus le regarde. Il est très pâle. Ses yeux bien ouverts semblent voir, au-delà du visage de Judas, tous les supplices qui l’attendent, et pourtant, malgré leur tristesse, ils restent pleins de douceur et surtout de sérénité : ce sont les yeux limpides d’un innocent en paix. Il répond :

« Je le sais. Je sais même ce que tu ignores. Mais j’espère en la miséricorde de Dieu. Lui, qui est miséricordieux envers les pécheurs, fera preuve de miséricorde à mon égard aussi. Je ne lui demande pas de ne pas souffrir, mais de savoir souffrir.

565.11

Et maintenant, partons. Samuel, précède-nous un peu et avertis Jean que nous serons bientôt au village. »

Samuel s’incline et s’éloigne rapidement.

Jésus commence à descendre. Le sentier est si étroit qu’ils doivent avancer l’un derrière l’autre, mais cela n’empêche pas Judas de parler :

« Tu te fies trop à cet homme, Maître. Je t’ai dit ce qu’il est : des disciples de Jonathas, c’est le plus exalté et le plus facile à rendre exalté. De toutes façons, maintenant, c’est trop tard. Tu t’es livré entre ses mains. C’est un espion près de toi. Et toi, qui plus d’une fois et les autres plus que toi, avez pensé que moi j’en étais un ! Moi, je ne suis pas un espion. »

Jésus s’arrête et se retourne. La douleur et la majesté se fondent dans son visage et dans son regard qui dévisage l’apôtre. Il dit :

« Non, tu n’es pas un espion : tu es un démon. Tu as dérobé au Serpent sa prérogative de séduire et de tromper pour détacher de Dieu. Ton comportement n’est ni pierre ni bâton, mais il me blesse davantage qu’un coup de pierre ou de bâton. Ah ! rien ne contribuera autant à mon atroce souffrance, que ton comportement pour faire subir le martyre au Martyr. »

Jésus se couvre le visage de ses mains, comme pour se cacher l’horreur, puis descend au pas de course le sentier.

Judas crie derrière lui :

« Maître ! Maître ! Pourquoi me fais-tu de la peine ? Cet homme faux t’a certainement raconté des calomnies… Ecoute-moi, Maître ! »

Mais Jésus ne l’écoute pas. Il court, il vole dans la descente. Il passe sans s’arrêter à côté des bûcherons ou des bergers qui le saluent. Il passe, salue, mais ne s’arrête pas. Judas se résigne à se taire…

565.12

Ils sont presque en bas quand ils croisent Jean qui, avec son visage limpide, qu’éclaire son paisible sourire, est en train de monter à leur rencontre. Il tient par la main un petit enfant qui babille en suçant un rayon de miel.

« Maître, me voici ! Ce sont des gens de Césarée de Philippe. Ils ont appris ta présence ici, et ils sont venus. Comme c’est étrange ! Personne n’a parlé, et tout le monde sait où tu es ! Maintenant, ils se reposent. Ils sont très fatigués. Je suis allé me faire donner par Dina du lait et du miel, car il y a un malade. Je l’ai mis dans mon lit. Je n’ai pas peur. Et le petit Hanne a voulu venir avec moi. Ne le touche pas, Maître, il est tout poissé de miel. »

Et le bon Jean rit, lui qui a sur ses vêtements de nombreuses gouttes de miel et des marques de doigts tachés. Il rit en cherchant à retenir le bambin, qui voudrait aller offrir à Jésus son rayon de miel à moitié sucé et qui crie :

« Viens. Il y en a des quantités pour toi !

– Oui. On est en train d’enlever les rayons chez Dina. Je le savais. Ses abeilles ont essaimé depuis peu » explique Jean.

565.13

Ils se remettent en route pour arriver à la première maison où retentit encore le tam-tam dont se servent les apiculteurs, je ne sais pas exactement pour quelle raison. Des grappes d’abeilles — on croirait voir de grosses pignes d’un drôle de raisin — pendent à certaines branches, et des hommes les recueillent pour les porter aux nouvelles ruches. Plus loin, des abeilles qui bourdonnent inlassablement sortent des ruches déjà installées et y rentrent.

Des hommes saluent, et une femme accourt avec de très beaux rayons qu’elle offre à Jésus.

« Pourquoi t’en priver ? Tu en as déjà donné à Jean…

– Mes abeilles ont produit une récolte abondante. Cela ne me gêne pas d’en offrir. Mais bénis les nouveaux essaims. Regarde : ils sont en train de recueillir le dernier. Cette année, nous avons eu deux fois plus de ruches. »

Jésus se dirige vers les minuscules cités des abeilles et les bénit une par une, en levant la main au milieu du bourdonnement des ouvrières qui n’arrêtent pas leur travail.

« Elles sont en fête, et bien agitées. C’est pour elles une demeure nouvelle… remarque un homme.

– Et de nouvelles noces. On dirait vraiment des femmes qui préparent la fête nuptiale, dit un autre.

– Oui, mais les femmes jacassent plus qu’elles ne travaillent. Celles-ci, au contraire, œuvrent en silence, et même les jours de festin de noces. Elles sont sans cesse à la peine pour établir leur royaume et y accumuler leurs richesses, répond un troisième.

– Travailler toujours pour la vertu, c’est permis, c’est même un devoir. Travailler sans arrêt pour le seul profit, non. Ne peuvent le faire que ceux qui ignorent qu’il y a un Dieu, et qu’il faut l’honorer un jour par semaine. Travailler en silence, c’est un mérite que tout le monde devrait apprendre des abeilles, car c’est la condition qui permet d’accomplir une œuvre sainte. Soyez donc comme vos abeilles dans la justice : inlassables et silencieux. Dieu voit. Dieu récompense. Paix à vous » dit Jésus.

565.14

Une fois seul avec ses apôtres, il ajoute :

« Et c’est spécialement aux ouvriers de Dieu que je propose les abeilles comme modèles. Elles déposent dans le secret de la ruche le miel formé en elles par un travail infatigable sur des corolles saines. Leur fatigue n’est même pas visible, tant elles travaillent avec bonne volonté, en voletant de fleur en fleur telles des points d’or, avant d’entrer, chargées de sucs, pour élaborer leur miel dans l’intimité des cellules. Il faudrait savoir les imiter. Choisir les enseignements, les doctrines, les amitiés saines, capables de produire des sucs d’une vertu véritable, et puis savoir s’isoler pour élaborer, à partir de ce que l’on a récolté avec entrain, la vertu, la justice — qui est comme le miel extrait de nombreux éléments sains —, sans oublier la bonne volonté sans laquelle les sucs pris çà et là ne servent à rien. Savoir méditer humblement, dans le fond de notre cœur, sur ce que nous avons vu et entendu de bon, sans être envieux si, à côté des abeilles ouvrières, il y a la reine, c’est-à-dire quelqu’un de plus juste que ne l’est celui qui médite. Toutes les abeilles sont nécessaires dans la ruche, aussi bien les ouvrières que les reines. Malheur si toutes étaient des reines, malheur si toutes étaient des ouvrières. Elles mourraient aussi bien les unes que les autres. Car les reines n’auraient pas de nourriture pour procréer s’il n’y avait pas d’ouvrières, et les ouvrières cesseraient d’exister si les reines ne procréaient pas. N’envions pas les reines. Elles aussi ont leur fatigue et leur pénitence. Elles ne voient le soleil qu’une seule fois, dans l’unique vol nuptial. Avant et après, elles butent sans cesse contre la clôture entre les parois ambrées de la ruche. A chacun son devoir ; or chaque devoir est un choix, et tout choix est une charge en plus d’un honneur. Les ouvrières ne perdent pas leur temps à des vols inutiles ou dangereux sur des fleurs malades et vénéneuses. Elles ne tentent pas l’aventure, elles ne désobéissent pas à leur mission, elles ne se révoltent pas contre la fin pour laquelle elles ont été créées. Quels admirables petits êtres ! Que d’enseignements pour les hommes !… »

Jésus se tait, perdu dans sa méditation.

565.15

Judas se souvient tout à coup qu’il doit aller je ne sais où, et il part en courant. Il reste Jésus et Jean. Sans se faire remarquer, Jean porte sur Jésus un regard attentif, affectueusement angoissé. Jésus lève la tête et se tourne un peu pour rencontrer le regard du Préféré qui le scrute. Son visage s’éclaire alors qu’il l’attire à lui.

Jean, ainsi enlacé, demande tout en marchant :

« Judas t’a encore fait souffrir, n’est-ce pas ? Et il doit avoir troublé aussi Samuel.

– Pourquoi ? Samuel t’en a-t-il parlé ?

– Non. Mais j’ai compris. Il a dit seulement : “ Généralement, en vivant près de quelqu’un qui est vraiment bon, on devient bon. Mais Judas ne l’est pas, bien qu’il vive avec le Maître depuis trois ans. Il est profondément corrompu et la bonté du Christ ne pénètre pas en lui, tant il est rempli de perversité. ” Je n’ai su que dire… car c’est vrai…

565.16

Mais pourquoi Judas est-il ainsi ? Est-il possible qu’il ne change jamais ? Et pourtant… nous avons tous les mêmes enseignements… et quand il est venu parmi nous, il n’était pas pire que nous…

– Mon Jean ! Mon doux enfant ! »

Jésus dépose un baiser sur son front découvert et si pur, et lui murmure dans les cheveux qui se soulèvent blonds et légers :

«Certaines personnes semblent vivre pour détruire le bien qui est en elles. Tu es pêcheur, et tu sais comment réagit la voile quand le tourbillon la presse. Elle s’incline tellement vers l’eau qu’elle pourrait renverser la barque et devenir dangereuse pour elle, de sorte qu’il faut parfois l’abaisser et se passer d’aile pour aller au nid. Car la voile, prise par le tourbillon, n’est plus une aile, mais du lest qui l’entraine au fond, à la mort, au lieu de l’amener à terme. Mais si le souffle féroce du tourbillon s’apaise, ne serait-ce que de courts instants, la voile redevient aussitôt une aile et court rapidement vers le port pour conduire au salut. Il en est ainsi de beaucoup d’âmes. Il suffit que le tourbillon des passions s’apaise pour que l’âme abaissée, et pour ainsi dire submergée par… par ce qui n’est pas bon, recommence à avoir des aspirations vers le Bien.

– Oui, Maître. Mais avec cela… dis-moi… est-ce que Judas arrivera jamais à ton port ?

– Ne me fais pas regarder l’avenir de l’un de mes plus chers apôtres ! J’ai devant moi l’avenir de millions d’âmes pour lesquelles mes souffrances seront vaines… J’ai devant moi toutes les souillures du monde… La nausée me bouleverse. La nausée de tout ce bouillonnement d’abjections qui, à la manière d’un fleuve, couvre la terre et la couvrira, sous des aspects divers, mais toujours horribles pour la Perfection, jusqu’à la fin des siècles. Ne me fais pas regarder cela ! Laisse-moi me désaltérer et me réconforter à une source qui ignore la corruption, afin que j’oublie la pourriture d’un trop grand nombre, en te regardant toi seul, toi qui es ma paix ! »

Et, les yeux dans les yeux, son regard plongé dans les yeux limpides de l’apôtre vierge et affectueux, il lui donne encore un baiser…

565.17

Ils entrent dans la maison. Dans la cuisine se trouve Samuel, qui casse du bois pour épargner à la vieille Marie la fatigue d’allumer le feu.

Jésus s’adresse à la femme :

« Les pèlerins dorment-ils ?

– Je crois que oui. Je n’entends aucun bruit. Je vais maintenant porter de l’eau à leurs montures. Elles sont sous le hangar.

– Je m’en charge, mère. Va plutôt chez Rachel. Elle m’a promis du fromage frais. Dis-lui que je la paierai le jour du sabbat » dit Jean, en empoignant les deux récipients pleins d’eau.

Resté seul avec Samuel, Jésus s’approche de l’homme qui, penché sur le feu, souffle pour allumer la flamme, et il lui pose la main sur l’épaule :

« Judas nous a interrompus là-haut… Je veux te dire que je t’enverrai avec les apôtres le lendemain du sabbat. Peut-être préfères-tu cela…

– Merci, Maître. Je regrette de m’éloigner de toi, mais chez tes apôtres je te retrouve encore ; effectivement, j’aime mieux rester loin de Judas. Je n’osais pas te le demander…

– Parfait, c’est décidé. Et, comme moi, aie pitié de lui. N’en parle ni à Pierre ni à qui que ce soit d’autre…

– Je sais me taire, Maître.

– Plus tard arriveront les disciples, au nombre desquels Hermas et Etienne ainsi qu’Isaac — ce sont deux sages et un juste —, et beaucoup d’autres. Tu te trouveras bien, parmi de vrais frères.

– Oui, Maître. Tu comprends et tu secours. Tu es vraiment le bon Maître »

Et il se penche pour baiser la main de Jésus.

565.1

Jesus is still all alone, engrossed in thought, while walking slowly towards the thick wood to the west of Ephraim. The rustling noise of water rises from the torrent and the songs of birds come from the trees. The bright springtime sunshine is pleasant under the tangle of branches, and silent is the tread on the luxuriant grassy carpet. The sunbeams form a mobile carpet of circles or golden strips on the green grass and some flowers still covered with dew shine as if their petals were precious scales, when a disc of light centres on them while all around there is shadow.

Jesus climbs towards a ledge protruding like a balcony over the empty space underneath. A balcony on which a huge oak-tree grows, and from which the flexible twigs of wild blackberries, or dogroses, or ivy and clematis hang down, as they do not find room or sup­ports in their native place, too narrow for their exuberant vitality, and they hang in the empty space like loose dishevelled hair and they stretch out hoping to find something to which they may cling.

Jesus is now at the level of the ledge. He moves towards the most projecting spot, shifting aside the tangle of bushes. A flock

of small birds fly away whirring and chirping in fear.

565.2

Jesus stops watch­ing the man who has preceded Him up there and who, lying on the grass with his face downwards, almost on the edge of the ledge, his elbows pressed on the ground, his face resting in his hands, is look­ing at the empty space, towards Jerusalem. The man is Samuel, the ex-pupil of Jonathan ben Uziel. He is pensive. He sighs. He shakes his head…

Jesus shakes some branches to attract his attention and, seeing that His attempt has been vain, He picks up a stone from the grass and rolls it down the path. The noise of the stone bouncing down the slope rouses the young man, who turns around surprised saying: «Who is there?»

«It is I, Samuel. You have preceded Me in one of the places where I prefer to pray» says Jesus showing Himself from behind the mas­sive trunk of the oak-tree growing at the edge of the little path and He does so as if He had just arrived there.

«Oh! Master! I am sorry… But I will leave Your place free at once» he says standing up hurriedly and picking up his mantle that he had taken off and he had spread on the ground to lie on it.

«No. Why? There is room for two. The place is so beautiful! So iso­lated, solitary, suspended over the empty space, with so much light and such a wide view! Why do you want to leave it?»

«Well… to leave You free to pray …»

«And can we not do so together, or meditate, speaking to each other, elevating our spirits to God… forgetting men and their faults, thinking of God, our Father and the good Father of all those who seek and love Him with goodwill?»

Samuel shows surprise when Jesus says «forgetting men and their faults…» But he does not say anything. He sits down again.

565.3

Jesus sits beside him on the grass and says to him: «Sit here. And let us be together. See how clear the view is today. If we had the eyes of an eagle we would be able to see the white villages on the tops of the mountains around Jerusalem. And, perhaps, we could see a spot shining like a gem in the air and that would make our hearts throb: the golden domes of the House of God… Look. There is Bethel. You can see its white houses and there, beyond Bethel, there is Beeroth. How subtly crafty were the inhabitants of that place and of the neighbourhood! But it turned out well, although’ deceit is never a good weapon. It turned out well because it placed them at the service of the true God. It is always better to lose hu­man honours in order to gain closeness to divinity. Even if human honours were many and valuable, and the closeness to divinity is humble and unknown. Is that right?»

«Yes, Master. What You say is right. That is what happened to me.»

«But you are sad, although the change should make you happy. You are sad. You are suffering. You live in isolation. You look at the places you left. You look like an imprisoned bird that, pressed against the bars of its prison, looks with so much regret at the place it loved. I am not asking you not to do that. You are free. You may go and…»

«Lord, has Judas perhaps spoken ill of me that You are saying so?»

«No, Judas has not spoken to Me. He has not spoken to Me, but he spoke to you. That is why you are sad. And you live in isolation as you are down-hearted because of that.»

«Lord, if You know all that, although no one has mentioned that to You, You must also know that I am sad not because I want to leave You, because I regret I was converted, or because I have a longing for the past… or because I am afraid of men, as they would like to instil the fear of their punishments into me.

565.4

I was looking over there. That is true. I was looking towards Jerusalem. But not be­cause I am anxious to go back there. I mean: to go back there as I was previously. Because I am certainly eager, like everybody else, to go back as an Israelite who loves to go into the House of God and worship the Most High, and I do not think that You can reproach me for that.»

«I am the first, in my double Nature, to long for that altar and I would like to see it surrounded by holiness, as befits it. As the Son of God, everything that honours Him is a sweet voice to Me and as the Son of man, as an Israelite, and therefore a Son of the Law, I see the Temple and the altar as the most sacred place in Israel, in which our humanity can approach Divinity and become scented with the air surrounding the throne of God. I do not abol­ish the Law, Samuel. It is sacred to Me because it was given by my Father. I perfect it and complete it with new parts. As the Son of God I can do that. My Father sent Me for that. I have come to establish the spiritual Temple of My Church, against which Temple neither men nor demons shall prevail. And the tables of the Law will have a place of honour in it, because they are eternal, perfect, untouchable. The commandment “do not commit this or that sin” contained in those tables, which in their lapidary conciseness com­prise what is necessary to be just in the eyes of God, is not cancelled by my word. On the contrary! I also give those ten commandments to you. I only tell you to keep them with perfection, that is, not for fear of the wrath of God on you, but out of love for your God Who is your Father. I have come to put your hands of sons into the hands of your Father. For how many ages those hands have been divided! Punishment divided them. Sin divided them. Now that the Redeem­er has come, sin is about to be cancelled. Barriers are falling. You are once again the sons of God.»

«That is true. You are good and you comfort. Always. And You know. So I shall not tell You my worry.

565.5

But I ask You: why are men so wicked, insane and foolish? How and with which expedients can they diabolically influence us to do evil things? And why are we so blind as not to see real facts and to believe false ones? And how can we become such demons? And persist when one is close to You? I was looking there and I was thinking… Yes. I was thinking of how many streams of poison come out from there to upset the children of Israel. I was considering how the wisdom of the rabbis can be joined to so much iniquity that misrepresents things in order to deceive people. I was thinking above all of that, because…» Samuel, who had spoken passionately, stops and lowers his head.

Jesus ends the sentence: «…because Judas, my disciple, is what he is, and he grieves Me and those who are around Me or come to Me, as you did. I know. Judas is trying to send you away from here and he makes insinuations and sneers at you…»

«Not only at me. Yes. He poisons my joy of coming to justice. He poisons it so skilfully that I think I am like a traitor here, betray­ing You and myself. Myself, because I flatter myself that I am bet­ter, whereas I shall be the cause of your ruin. In fact I do not know myself as yet… and if I meet those of the Temple I may fail in my purpose and be… Oh! if I had done it then, I would have had the excuse of not knowing You for what You are, because I knew of You what I was told to make a cursed man of me. But if I did it now! What curse will be that of the traitor of the Son of God! I was here… Pensive, yes. I was wondering where I might flee to save my­self from myself and from them. I was thinking of fleeing to some remote place, to join those of the Diaspora… Away, far away, to prevent the demon from, making me commit sin… Your apostle is right in not trusting me. He knows me, because he knows us all knowing our Leaders… And he is right in doubting me. When he says: “Don’t you know that He tells us that we shall be weak? Just imagine: we are His apostles and have been with Him for such a long time. And you, infected as you are with old Israel, have just come, and you have come when circumstances make us shudder, do you think you have enough strength to remain just?” when he says so he is right.» The man is down-hearted and lowers his head.

565.6

«How much grief the sons of men can give themselves! Satan really knows how to make use of that disposition of theirs to ter­rorise them completely and separate them from the Joy that comes towards them to save them. Because the sadness of the spirit, the fear of the morrow and worries are always weapons that man puts in the hands of his enemy, who frightens him by means of the same phantoms that man himself imagines. And there are other men who really form an alliance with Satan to help him frighten his brothers. But, My dear son, is there not a Father in Heaven? A Father Who, as this fissure in the rock provides for this blade of grass – this fissure full of earth situated in such a way that the moisture of dews flowing on the smooth stone gathers in that thin furrow, so that the blade of grass may live and yield this tiny little flower, which is not less admirable for its beauty than the great sun shining up there: both the perfect work of the Creator – a Father Who takes care of the blade of grass grown on a rock, will He not take care of one of His sons who firmly wants to serve Him? Oh! God really does not disappoint the “good” wishes of man. Because it is He Who kindles them in your hearts. He providently and wisely creates the circumstances to encourage the wishes of His children, not only, but in the event that a desire to honour Him should follow an imper­fect path, He straightens and perfects it so that it may follow the right path. You were among the latter. You believed, you wanted and were convinced that you were honouring God by persecuting Me. The Father saw that your heart did not hate God, but it longed to give glory to God by removing from the world He Who you were told was the enemy of God and the corrupter of souls. So He cre­ated the circumstances to comply with your desire to give glory to your Lord. And here you are now among us. And can you believe that God will abandon you, now that He brought you here? Only if you abandon Him, the power of evil will be able to overwhelm you.»

«I do not want that. My will is sincere!» states the man.

«So what are you worried about? About the word of a man? Speak. He thinks with his own thought. And man’s thought is al­ways imperfect.

565.7

But I will see to that.»

«I do not want You to reproach him. Your assurance that I will not sin is enough for me.»

«I assure you. It will not happen to you because you do not want it to happen. Because see, son, it would not help you to go to the Diaspora or even to the end of the world to preserve your soul from hating the Christ and from being punished for such hatred. Many in Israel will not sully themselves with the Crime materially, but they will not be less guilty than those who condemn Me and execute the sentence. I can speak to you of these matters. Because you are already aware that everything has been arranged for them. You know the names and the thoughts of My most pitiless enemies. You said: “Judas knows us all because he knows all the Leaders”. But if he knows you, you also, the minor ones, because you are like lesser stars near the major planets, you also know what is being done, how it is done and who does it, and what plots are made and which means are studied… So I can speak with you. I could not do so with the others… What I can suffer and bear with, others cannot…»

«Master, but how can You, knowing that, be so…

565.8

Who is coming up the path?» Samuel stands up to look. He exclaims: «Judas!»

«Yes. It is I. I was told that the Master had passed through here, instead I find you. So I will go back, leaving you to your thoughts» and he laughs with his sly laugh that is more mournful than the cry of an owl, so insincere it is.

«I am here as well. Do they want Me at the village?» says Jesus appearing behind Samuel’s shoulders.

«Oh! You! So you were in good company, Samuel! And You, too, Master…»

«Yes. The company of one who embraces justice is always good.

So you wanted Me, to be with Me, Come, then. There is room for you and also for John, if he were with you.»

«He is down in the village, at grips with other pilgrims.»

«If there are some pilgrims, I must go.»

«No. They will be staying all day tomorrow. John is settling them in our beds for their stay.

565.9

He is happy to do so. Of course, every­thing makes him happy. You are really like each other. I do not know how you manage to be always happy even when things are most…worrying.»

«The same question I was going to ask when you came!» exclaims Samuel.

«Ah! Were you? So you are not happy, and you are surprised that other people, in conditions even more… difficult than ours, can be so.»

«I am not unhappy. I am not speaking for myself. But I am thinking from which sources the serenity of the Master may come, as He is aware of his future and yet He is not upset by anything.»

«From heavenly sources, of course! It is natural! He is God! Do you doubt it? Can a God suffer? He is above sorrow. His Father’s love is for Him like… like an exhilarating wine. And the firm belief that his actions… are the salvation of the world is an exhilarating wine for Him. And then… Can He have the physical reactions that we, humble men, have? That is contrary to common sense. If Adam, when innocent, was not aware of any kind of sorrow, neither would he have ever become aware of it if he had remained inno­cent, Jesus… the Superinnocent, the creature… I do not know whether I should say so: uncreated being God, or created because He has relatives… oh! how many insoluble “whys” for future gen­erations, my Master! If Adam was free from sorrow because of his innocence, can one think that Jesus must suffer?»

Jesus’ head is bent. He has sat down once again on the grass. His face is veiled by his hair. So I cannot see his countenance.

Samuel standing in front of Judas, who is also standing, replies: «But if He is to be the Redeemer, He must really suffer. Do you not remember David and Isaiah?»

«I do remember them! But although they saw the figure of the Redeemer, they did not see the immaterial help He would receive to be… shall we say: tortured, without feeling any pain.»

«Which help? A man may love sorrow or suffer it with resigna­tion, according to his perfection of justice. But he will always feel it. Otherwise… if he did not feel it… it would not be sorrow.»

«Jesus is the Son of God.»

«But He is not a ghost! He is true Flesh! And flesh suffers if it is tortured. He is a true Man! And the thought of man suffers if it is offended and despised.»

«His union with God eliminates such human things in Him.»

565.10

Jesus raises His head and says: «I solemnly tell you, Judas, that I suffer and shall suffer like every man, and more than every man. But I can be equally happy, enjoying the holy spiritual happiness of those who have achieved freedom from the sadness of the Earth, because they have embraced the will of God as their only bride. I am able to do so because I have overcome the human concept of hap­piness, the uneasiness of happiness, as men imagine it. I do not pur­sue what, according to men, happiness consists of; but I place my joy in exactly the opposite of what man pursues as such. The things that are avoided and despised by man, because they are considered burdensome and grievous, are the sweetest thing for Me. I am not interested in one hour. I consider the consequences that one hour may bring about in eternal life. My episode will come to an end, but its fruit will last. My sorrow will end, but the value of my sor­row will not end. And what could I do with one hour of the so called “happy state” on the Earth, an hour achieved after pursuing it for years and years, when that hour could not come with Me as delight in eternal life and I had to enjoy it all by myself, without sharing it with those whom I love?»

«But if You should triumph, we, your followers, would take part in your happiness!» exclaims Judas.

«You? And who are you, compared with the past, present and fu­ture multitudes to whom my grief will bring joy? I see far beyond earthly happiness. I look at the supernatural beyond it. I can see My sorrow change into eternal delight for a multitude of people. And I embrace sorrow as the greatest power to reach the perfect happiness, which is to love one’s neighbour to the extent of suffer­ing to give him joy, to the extent of dying for him.»

«I do not understand that happiness» states Judas.

«You are not wise yet. Otherwise you would understand it.»

«And is John wise? He is more ignorant than I am!»

«From a human point of view he is. But he possesses the science of love.»

«All right. But I do not think that love can prevent clubs from being clubs and stones from being stones and both from causing pain to the bodies they strike. You always say that sorrow is dear to You because it is love for You. But when You are really caught and tor­tured, if that is possible, I do not know whether You will still be of the same mind. You had better think about it while You can shun pain. It will be dreadful, You know? If men will be able to get hold of You … oh! they will have no respect for You!»

Jesus looks at him. He is very pale. His wide open eyes seem to be seeing, beyond Judas’ face, all the tortures awaiting Him, and yet, although sad, they remain meek and kind, and above all, se­rene: two limpid eyes of an innocent at peace. He replies: «I know. I know also what you do not know. But I hope in God’s mercy. He, Who is merciful with sinners, will have mercy also on Me. I will not ask Him not to suffer, but to be able to suffer.

565.11

And now let us go. Samuel, go a little ahead of us and tell John that I shall soon be in the village.»

Samuel bows and goes away quickly. Jesus begins to descend. The path is so narrow that they have to proceed one behind the other. But that does not prevent Judas from saying: «You trust that man too much, Master. I told You who he is. He is Jonathan’s most hot-headed and excitable disciple. Of course, it is late now. You have put Yourself into his hands. He is a spy close to You. And You more than once thought that I was a spy and the others thought so more than You did! I am not a spy.»

Jesus stops and turns around. Grief and majesty mingle on His face and in His eyes fixed on His apostle. He says: «No. You are not a spy. You are a demon: You have stolen the Serpent’s prerogative to seduce and deceive in order to take people away from God. Your behaviour is neither a stone nor a club, but it hurts Me more than a blow with a stone or a club. Oh! in my atrocious suffering there will be nothing greater than your behaviour capable of torturing the Martyr.» Jesus covers his face with his hands, as if He wished to conceal so much horror, and then He begins to run down the path.

Judas shouts after Him: «Master! Master! Why are You grieving me? That liar has certainly made a slanderous report to You… Listen to me, Master!»

Jesus does not listen. He runs, He flies down the slopes. He does not stop when He passes by the woodcutters and shepherds who greet Him. He passes, He waves to them but does not stop. Judas resigns himself to being silent…

565.12

They are almost down when they meet John who, with his pel­lucid face brightened by a serene smile, is climbing towards them. He is holding by the hand a little boy who is prattling while suck­ing a honeycomb.

«Master, here I am! There are people from Caesarea Philippi. They heard that You are here and they came. How strange it is! No one has spoken and everybody knows where You are! They are resting now. They are very tired. I went and asked Dinah to give me some milk and honey because there is a sick person. I put him in my bed. I am not afraid. And little Annas wanted to come with me. Don’t touch him, Master; he is all sticky with honey» and kind John, who has many drops and finger-marks of honey on his tunic, laughs. He laughs trying to hold back the boy who would like to go and offer Jesus his half-sucked honeycomb and shouts: «Come. There are so many of them for You!»

«Yes. They are removing the honeycombs at Dinah’s. I knew. Her bees swarmed not long ago» says,John.

565.13

They set out again and arrive at the first house where the bee­masters are still making the usual deafening noise near the bee­hives, I do not know exactly why. Swarms of bees – they look like big bunches of strange grapes – are hanging from some branches and some men are taking them to put them into the new beehives. Farther away, untiring buzzing bees are going in and coming out of beehives already settled.

The men greet Jesus and a woman approaches Him with some lovely honeycombs which she offers Him.

«Why are you depriving yourself of them? You have already given John some…»

«Oh! My bees have made much honey. It’s a pleasure for me to offer it. But please bless the new swarms. Look, they are taking the last one. This year we had to double the beehives.»

Jesus goes towards the tiny towns of the bees and He blesses them one by one raising His hand amidst the humming of the worker­bees that do not stop working.

«They are all merry and they are also all excited. A new house…» says a man.

«And a new wedding. They really look like women preparing a wedding feast» says another one.

«Yes, but the women do more talking than work. The bees, in­stead, work in silence and they work also on the days of wedding feasts. They work all the time to build their kingdom and their wealth» replies a third man.

«To be always working in virtue is lawful, nay, it is dutiful. To work always for the sake of gain, no, it is not. Only those can do it who do not know that they have a God Who is to be honoured on His day. To work in silence is a merit that everybody should learn of the bees. Because holy things are done holily in silence. Be like your bees in justice. Untiring and silent. God sees. God rewards. Peace be with you» says Jesus.

565.14

And when He is alone with His two apostles He says: «To the workers of God in particular I propose the bees as their model. They deposit in the secrecy of the beehive the honey formed in their in­teriors through their unremitting work on wholesome corollas. Their fatigue does not even appear to be such, as they do it with so much goodwill, flying, like golden dots, from flower to flower, and then, laden with juice, going in to elaborate their honey in the privacy of their little cells. People ought to imitate them, choosing lessons, sound doctrines and friendships, capable of producing juices of true virtue, then living in isolation to elaborate, using what has been actively gathered, virtue, justice, which are like the honey extracted from many wholesome elements, of which one of the most impor­tant ones is goodwill, without which the juices collected here and there would be of no use. It is also necessary to meditate humbly, in the secrecy of one’s heart, on the good we have seen and heard, without being envious if queen bees are near working bees, that is, if there is someone who is more just than he who meditates. Both queens and workers are necessary in the beehive. It would be a dis­aster if they were all queens or all workers. Both the former and the latter would die. Because the queens would have no food to procreate if there were no workers, and the workers would no longer exist if the queens did not procreate. And the queens are not to be envied. They have their work and their penitence. They see the sun but once, in their only one nuptial flight. Before it and af­ter it, they are in perpetual seclusion within the amber-coloured walls of the beehive. Each one has its task, and each task is an ap­pointment, and each appointment is an onus besides being an honour. And the working bees waste no time in vain or dangerous flights around diseased or poisonous flowers. They make no adven­turous attempts. They do not fail to carry out their mission, they do not rebel against the purpose for which they were created. Oh! Admirable little beings! How much you teach men!…» Jesus becomes silent, lost in His meditation.

565.15

Judas suddenly remembers that he has to go I do not know where, and he almost runs away. Jesus and John remain. And John looks at Jesus without letting Him notice. A keen look of anxious love. Jesus raises His head, turns around a little, meeting the eyes of his favourite apostle who is watching Him. His face brightens when He draws John to Himself.

John, while walking embraced thus, asks: «Judas has grieved You again, has he not? And he must have upset Samuel as well.»

«Why? Has he said anything to you?»

«No. But I have understood. He only said: “Generally speaking when one lives near someone who is really good, one becomes good. But Judas is not, although he has lived with the Master for three years. He is corrupt in the depth of his heart, and the goodness of the Christ does not penetrate him, so full he is of wickedness”. I did not know what to say, because it is true…

565.16

But why is Judas like that? Is it possible that he will never change? And yet… we are all getting the same lessons and when he came among us, he was not any worse than we were.»

«My John! My meek child!» Jesus kisses his forehead, so open and pure, and He whispers through his fair hair that undulates lightly: «There are people who seem to live to destroy the good that is in them. You are a fisherman and you know what a sail does when a hurricane strikes it. It bends so low near the water that it almost overturns the boat and becomes a danger for it, so that at times it is necessary to lower it, and one is thus left without wings with which to fly towards one’s nest, because a sail, struck by a hurri­cane is no longer a wing, but it becomes ballast that takes one to the bottom, to death and not to salvation. But if the violent blast of the hurricane abates, even for a few moments, then the sail be­comes wing at once and the boat sails fast towards the harbour tak­ing the people in it to salvation. The same happens to many souls. It is enough that the hurricane of passions subsides, and the soul that was bent and almost submerged by… by what was not good, begins to yearn for Goodness.»

«Yes, Master. But… so… tell me… will Judas ever reach Your harbour?»

«Oh! Do not make Me look at the future of one of My dearest apos­tles! I have in front of me the future of millions of souls for whom My sufferings will be useless!… I have in front of Me all the base actions of the world… The nausea upsets Me. The nausea of the seething of filthy things that like a river cover and will cover the Earth, in different ways, but always dreadful for the Perfection, until the end of time. Do not make Me look! Let Me quench My thirst and find comfort at a spring that does not taste of corruption, and let Me forget the verminous rottenness of too many people, by look­ing at you alone, My peace!» and He kisses, him again between his eyebrows looking deeply into the limpid eyes of the pure loving apostle…

565.17

They go into the house. Samuel is in the kitchen chopping the wood to spare the old woman work when lighting the fire.

Jesus asks the woman: «Are the pilgrims sleeping?»

«I think so. I do not hear any noise. I am going to take this water to the mounts. They are in the wood-store.»

«I will do that, mother. You had better go to Rachel’s house. She promised me some fresh cheese. Tell her that I will pay her on the Sabbath» says John picking up two tubs full of water.

Only Jesus and Samuel remain. Jesus approaches the man who bending over the fire is blowing to light the flame and He lays His hand on his shoulder saying: «Judas interrupted us up there… I want to tell you that I will send you with My apostles the day after the Sabbath. Perhaps you prefer that…»

«Thank You, Master. I am sorry not to be near You. But in Your apostles I shall find You once again. Yes, I prefer to be far away from Judas. I did not dare to ask You…»

«All right, That is settled. And take pity on him. As I do. And do not tell Peter or anybody else …»

«I can hold my tongue, Master.»

«The disciples will come later. There is Hermas and Stephen, and there is Isaac, two wise men and a just one, and many more. You will like it, among true brothers.»

«Yes, Master. You understand and help us. You really are the good Master» and he bends to kiss Jesus’ hand.