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Ils sortent du Temple où fourmille la foule pour se plonger dans le grouillement des rues où tout le monde court, affairé par les derniers préparatifs de la Pâque, tandis que les retardataires cherchent anxieusement une pièce, un vestibule, n’importe quoi, pour en faire un cénacle où consommer l’agneau.
Il est facile dans ces conditions de se rencontrer et de ne pas se reconnaître dans la continuelle bousculade qui fait défiler sous les yeux des personnes de tous les âges, de toutes les régions où il y a des juifs, là où le sang pur d’Israël a contracté, par mélanges de sang ou simplement par mimétisme, des ressemblances avec d’autres races. C’est ainsi que l’on voit des Hébreux de type égyptien ; d’autres, avec leurs grosses lèvres, leurs nez camus et leur angle facial, semblent provenir de croisements avec les Nubiens ; d’autres encore, aux traits bien dessinés, fins, aux membres élancés, aux yeux vifs, trahissent leur appartenance aux colonies grecques ou des mélanges avec les Grecs ; des hommes robustes et de grande taille, au visage plutôt carré, annoncent clairement qu’ils ne sont pas tout à fait étrangers aux Latins ; il y en a beaucoup aussi que nous dirions aujourd’hui circassiens ou perses, avec déjà quelque chose qui rappelle les yeux mongols ou indiens dans le faciès très blanc des premiers et olivâtre des seconds. Cela forme un beau kaléidoscope de visages et de vêtements ! L’œil s’en lasse, au point qu’il finit facilement par regarder sans voir. Mais ce qui échappe à l’un est remarqué par l’autre. Il est donc compréhensible que ce qui échappe au Maître, toujours un peu absorbé en lui-même quand on le laisse en paix, sans l’interroger, est remarqué par l’un ou l’autre de ceux qui l’accompagnent. Et les apôtres les plus proches de Jésus se désignent ce qu’ils voient et chuchotent entre eux en faisant des commentaires… très humains sur les personnes qu’ils se montrent.