46.1
Je revois la solitude pierreuse que j’avais déjà vue à ma gauche dans la vision du baptême de Jésus au Jourdain. Je dois cependant y avoir pénétré profondément, parce que je ne vois plus le beau fleuve aux eaux lentes et bleues ni la veine verte qui le longe sur ses deux rives, alimentée par cette artère aquatique. Ici, rien d’autre que la solitude, des pierres, une terre tellement brûlée qu’elle en est réduite à l’état de poussière jaunâtre qu’à chaque instant le vent soulève en petits tourbillons. On dirait le souffle d’une bouche fiévreuse tant ils sont secs et brûlants, et la poussière qui pénètre dans le nez et la gorge est une vraie torture. Ici et là, de très rares petits buissons épineux dont on ne sait comment ils peuvent résister dans cette désolation. On dirait des touffes de cheveux sur le crâne d’un homme chauve. Au-dessus, un ciel d’un bleu impitoyable, en bas le sol aride, et tout autour, des rochers et le silence. C’est tout ce que je vois comme nature.