Ils doivent avoir anticipé leur départ — peut-être sur le conseil des habitants d’Engaddi —, car il fait encore bien nuit et une lune presque pleine éclaire la ville d’une lumière très vive. Les ruelles sont des rubans d’argent au milieu des cubes des maisons et des murailles des jardins, dont la chaux semble s’être changée en marbre de sculpteur par l’effet magique des rayons lunaires. Enveloppés dans cette luminescence, les palmiers et les autres arbres prennent un aspect fantastique. Les sources et les ruisseaux forment de petites cascades parées de diamants. Dans les frondaisons, les rossignols égrènent des chapelets de notes prodigieuses, unissant leurs chants à celui des eaux qui, de nuit, paraît toujours plus net.
La ville est endormie, mais quelques personnes accompagnent le Maître. Ce sont les hommes des maisons où logeaient Jésus et les apôtres, et plusieurs autres habitants qui se sont unis à eux. Le chef de la synagogue marche à côté de lui. Ah ! il ne veut pas renoncer à l’escorter avant d’entrer en pleine campagne, même quand Jésus l’en prie !
Ils se dirigent vers la route qui mène à Massada, non pas la route basse qui longe la Mer Morte et dont j’entends dire qu’elle est malsaine et dangereuse à parcourir de nuit, mais celle de l’intérieur, taillée dans la côte, presque au sommet des collines qui bordent le lac.
Au clair de lune, la région est une splendeur ! On croirait parcourir un pays de rêve. Puis l’oasis, la véritable oasis, cesse et les palmiers se font rares. C’est la montagne proprement dite, avec ses arbres de haute futaie, ses prés, ses flancs creusés de cavernes comme presque toutes les montagnes de Palestine. Mais ici, je dirais qu’elles sont en plus grand nombre, et leurs ouvertures sont étranges, en longueur ou en largeur, les unes droites, d’autres de biais, certaines rondes à mi-côte, d’autres qui sont une simple fissure ; elles prennent des aspects effrayants à la lumière de la lune.