Gli Scritti di Maria Valtorta

539. La perfection expliquée à Jean,

539. La perfezione spiegata a Giovanni di Zebedeo

539.1

C’est une sereine mais rigoureuse matinée d’hiver. Le givre a blanchi de ses cristaux le sol et les herbes, et il a transformé les brindilles sèches qui gisent sur le sol en précieux bijoux saupoudrés de perles.

Jean sort de sa caverne. Son vêtement brun foncé fait ressortir sa pâleur. Il doit avoir très froid ou être souffrant, je ne sais, mais il est presque livide et a la démarche mal assurée de quelqu’un qui ne va pas bien. Il se dirige vers le ruisseau, hésite à y plonger les mains, puis se décide et, après les avoir jointes, boit une gorgée de cette eau limpide, mais certainement glaciale. Après s’être secoué les mains et avoir fini de les sécher sur un pan de son vêtement, il reste indécis… Il regarde alternativement vers les ruines où se trouve Jésus et vers son propre abri. Finalement, il retourne vers son étable à pas lents mais, arrivé à l’ouverture qui sert d’entrée, il a une sorte d’étourdissement et chancelle. Il tomberait s’il ne s’appuyait au mur à moitié en ruines, et reste là, la tête contre son bras replié, en s’arc-boutant contre le mur pendant quelque temps, puis relève la tête et regarde autour de lui… Il renonce à pénétrer dans sa tanière. En rasant le mur, en s’accrochant aux pierres branlantes et sans crépi, il fait les quelques pas qui le séparent de l’étable où se trouve Jésus et, parvenu presque sur le seuil, il se jette à genoux et gémit :

« Jésus, mon Seigneur, aie pitié de moi ! »

539.2

Jésus apparaît bientôt :

« Jean ? Que fais-tu ? Qu’as-tu ?

– Oh ! mon Seigneur ! J’ai faim ! Il y a presque deux jours que je n’ai pris aucune nourriture. J’ai faim et froid… »

Il claque des dents.

« Viens ! Entre ! » dit Jésus en l’aidant à se relever.

L’apôtre, soutenu par le bras de Jésus, pleure, la tête penchée sur son épaule et soupire :

« Ne me punis pas, Seigneur, si je t’ai désobéi… »

Jésus lui répond en souriant :

« Tu es déjà assez puni. Tu ressembles à un mourant… Assieds-toi ici sur cette pierre. Je vais faire du feu et te donner à manger… »

Jésus allume des rameaux et fait une belle flambée dans le foyer rustique près de la porte. L’odeur des branches brûlées et la gaieté des flammes se répandent dans la misérable caverne. Jésus enfile sur une baguette deux morceaux de pain, les présente à la flamme et, quand il voit qu’ils sont chauds, il les couvre du cœur gras des fromages laissés par les bergers ; le fromage fond et coule sur le pain que Jésus tient au-dessus de la flamme comme si c’était un plat.

« Mange maintenant, et ne pleure plus » dit-il en souriant toujours et en passant le pain à Jean, qui sanglote sans bruit comme un enfant épuisé, même pendant qu’il mange avec avidité cette nourriture réconfortante.

Jésus se tourne vers la mangeoire et en rapporte des pommes qu’il pose dans la cendre, tiédie par la chaleur du bois qui brûle sur deux pierres servant de chenets.

« Cela va mieux maintenant ? » dit-il en s’asseyant auprès de son apôtre.

Celui-ci fait signe que oui de la tête, sans cesser de pleurer.

Jésus lui passe un bras autour du cou et l’attire à lui, ce qui augmente les larmes de Jean, encore trop épuisé et trop troublé peut-être par la peur d’un reproche ou par l’émotion de se voir ainsi accueilli, pour savoir faire autre chose que pleurer.

Jésus le tient étroitement serré contre lui sans parler tant que Jean mange, puis il lui dit :

« Cela suffit pour le moment. Tu prendras les pommes plus tard. J’aurais voulu te donner un peu de vin, mais je n’en ai pas. J’ai trouvé avant-hier, à l’aube, du bois et de la nourriture à l’entrée de l’étable, mais il n’y avait pas de vin. S’il était plus tard, je pourrais aller chercher du lait auprès des bergers que j’ai vus en train de faire paître leurs troupeaux de l’autre côté du ruisseau, mais les troupeaux ne sortent pas tant que le givre n’a pas fondu…

– Je vais mieux, Seigneur… Ne te fais pas de souci pour moi.

– Et toi alors, de quoi t’affliges-tu ? Tu ressembles justement à un arbre sur lequel le soleil fait fondre le givre ! dit Jésus en souriant encore plus vivement et en embrassant Jean sur le front.

– Parce que je suis rongé par les remords, Seigneur… et…

539.3

Oui ! Laisse-moi faire ! Je dois te parler à genoux, te demander pardon…

– Pauvre Jean ! Vraiment, un effort supérieur à ce que tu peux endurer t’a affaibli même l’intelligence. Crois-tu donc que j’aie besoin de tes paroles pour te juger et t’absoudre ?

– Oui, oui. Tu sais tout, je le sais. Mais je ne trouverai pas de paix tant que je ne t’aurai pas avoué mon péché, ou plutôt mes péchés. Laisse-moi faire, laisse-moi accuser mes fautes.

– Eh bien, parle, si cela doit te donner la paix. »

Jean glisse à genoux et, levant son visage en larmes, il dit :

« J’ai péché par désobéissance, par présomption et par… j’ignore si je m’exprime bien en précisant : par humanité. Mais c’est ma faute la plus récente, la plus grave, celle qui me peine le plus et qui me montre quel serviteur inutile, égoïste et même bas, je suis. »

Les larmes inondent vraiment son visage, tandis que le sourire de Jésus devient toujours plus lumineux. Il reste un peu penché sur son apôtre en pleurs et le divin sourire est toute une caresse sur la douleur de Jean. Mais celui-ci est si affligé qu’il n’en tire aucun réconfort, et il poursuit :

« Je t’ai désobéi. Tu nous avais demandé de ne pas nous séparer, or je me suis tout de suite séparé de mes compagnons et je les ai scandalisés. J’ai répondu de travers à Judas, qui me faisait remarquer que je péchais. Je lui ai dit : “ Tu l’as fait hier, et moi aujourd’hui. Tu l’as fait pour avoir des nouvelles de ta mère, moi pour être avec le Maître et veiller sur lui, pour le défendre ”… C’était bien mon intention, mais je présumais de mes forces… Moi, pauvre incapable, te défendre, toi ! Et puis, j’ai présumé parce que je voulais t’imiter. J’ai pensé : “ Certainement, il prie et jeûne. Je ferai comme lui et dans la même intention que lui. ” Et au contraire… »

Les pleurs font place aux sanglots tandis que l’aveu de la misère de l’homme, de la matière qui a triomphé de la volonté de l’esprit, sort de la bouche de Jean :

« Et au contraire… j’ai dormi. Je me suis endormi aussitôt ! Je ne me suis réveillé qu’en plein jour et je t’ai vu aller au ruisseau, te laver, revenir ici. J’ai alors compris qu’on aurait bien pu s’emparer de toi sans que je sois prêt à te secourir. Et puis je voulais faire pénitence et jeûner, mais je n’en ai pas été capable. Par petits morceaux, comme pour ne pas avaler, j’ai fini par manger le premier jour le peu de pain dont je disposais. Tu sais que je n’avais rien d’autre. Et je n’étais pas encore rassasié que j’avais déjà tout fini. Le lendemain, j’ai eu encore plus faim, et cette nuit… Ah ! la nuit dernière, j’ai peu dormi à cause de la faim et du froid, et cette nuit-ci je n’ai pas dormi du tout… et je n’ai pas su résister davantage ce matin… Je suis venu parce que j’ai eu peur de mourir d’épuisement… et c’est cela qui me peine le plus : n’avoir pas su veiller pour prier et te protéger, mais avoir su le faire sous les tiraillements de la faim… Je suis un serviteur imbécile et lâche. Punis-moi, Jésus !

539.4

– Pauvre enfant ! Je voudrais que tout le monde ait à déplorer des fautes comme les tiennes ! Mais lève-toi et écoute-moi, alors la paix reviendra dans ton cœur. As-tu aussi désobéi à Simon-Pierre ?

– Non, Maître. Je ne l’aurais jamais fait, puisque tu nous as demandé de lui rester soumis comme à un frère aîné. Mais quand je lui ai dit : “ Mon cœur n’est pas tranquille de le voir partir seul ”, il a répondu : “ Tu as raison. Mais moi, je ne peux partir puisque j’ai l’obligation de vous conduire. Toi, vas-y, et que Dieu soit avec toi. ” Les autres ont haussé la voix, et Judas plus que les autres. Ils ont rappelé l’obéissance et ont même fait des reproches à Simon-Pierre.

– Ils ? Sois sincère, Jean.

– C’est vrai, Maître. C’est Judas qui a fait des reproches à Simon et m’a assez maltraité. Les autres ont seulement dit : “ Le Maître nous a ordonné de rester ensemble. ” Et c’était à moi qu’ils le disaient, pas à notre chef. Mais Simon a répondu : “ Dieu voit l’intention de l’acte et il pardonnera. Le Maître pardonnera, car c’est de l’amour. ” Après m’avoir béni, il m’a embrassé et envoyé à ta suite, comme le jour[1] que tu es allé avec Kouza sur l’autre rive du lac.

– Eh bien, je n’ai pas à t’absoudre de cette faute…

– Parce qu’elle est trop grave ?

– Non : parce qu’elle n’existe pas. Reviens ici, Jean, à côté de ton Maître, et écoute sa leçon. Il faut savoir appliquer les ordres avec justice et discernement, en sachant comprendre l’esprit de l’ordre, et non seulement les mots qui le composent. J’ai demandé : “ Ne vous séparez pas. ” Tu t’es séparé de tes frères et par conséquent cela aurait pu être un péché. Mais auparavant je vous avais recommandé : “ Soyez unis de corps et d’esprit, et soumis à Pierre. ” Par ces paroles, je l’ai choisi comme mon légitime représentant parmi vous, avec pleine faculté de juger et de vous commander. Par conséquent, ce que Pierre a fait ou fera en mon absence sera bien. Puisque je l’ai investi du pouvoir de vous conduire, l’Esprit du Seigneur qui est en moi sera aussi avec lui, et il le guidera pour donner les ordres que les circonstances imposent et que la Sagesse suggérera à l’Apôtre chef, pour le bien de tous. Si Pierre t’avait dit : “ N’y va pas ” et si tu étais quand même venu, le bon mouvement de ton acte — vouloir me suivre par amour pour me défendre et être avec moi dans les dangers — n’aurait pas été suffisant pour annuler ta faute. Il aurait vraiment fallu mon pardon. Mais Pierre, ton Chef, t’a dit : “ Vas-y. ” L’obéissance envers lui te justifie complètement. Es-tu convaincu ?

– Oui, Maître.

539.5

– Dois-je t’absoudre de la faute de présomption ? Réponds-moi sans te demander si je vois ton cœur : as-tu présumé orgueilleusement de vouloir m’imiter pour pouvoir dire : “ Par ma volonté, j’ai aboli les nécessités de la chair, parce que je peux ce que je veux ” ? Réfléchis bien… »

Jean réfléchit, puis il dit :

« Non, Seigneur. En m’examinant bien, non, je n’ai pas agi pour cette raison. J’espérais pouvoir jeûner parce que j’ai compris que la pénitence est une souffrance pour la chair, mais une lumière pour l’esprit. J’ai compris que c’est un moyen de fortifier notre faiblesse et obtenir beaucoup de Dieu. Tu le fais pour cela, et c’est pour cela que je voulais le faire moi aussi. Et je crois ne pas me tromper en disant que si tu jeûnes, toi qui es fort, qui es puissant, saint, nous devrions toujours jeûner, si cela était possible, pour être moins faibles et moins matériels. Mais je n’ai pas réussi. J’ai toujours faim, moi, avec une grande envie de dormir… »

Ses larmes recommencent à couler lentement, humblement, véritable aveu des limites des capacités de l’homme.

« Eh bien, crois-tu que cette petite misère de la chair a été inutile ? Ah ! tu te la rappelleras à l’avenir, quand tu seras tenté d’être sévère, exigeant, envers tes disciples et tes fidèles ! Elle te reviendra à l’esprit pour te dire : “ Souviens-toi que, toi aussi, tu as cédé à la fatigue, à la faim. Ne demande pas aux autres d’être plus forts que toi. Sois un père pour tes fidèles comme ton Maître l’a été pour toi, ce matin-là. ” Tu aurais très bien pu veiller et ne pas sentir ensuite cette grande faim. Mais le Seigneur a permis que tu sois soumis à ces besoins de la chair pour te rendre humble, toujours

plus humble, et plein de compassion pour tes semblables.

539.6

Beaucoup ne savent pas distinguer entre tentation et faute accomplie. La première est une épreuve qui donne du mérite et n’enlève pas la grâce, la seconde est une chute qui enlève le mérite et la grâce. D’autres ne savent pas distinguer entre événements naturels et fautes, et s’imaginent avoir péché alors que — et c’est ton cas — ils ont seulement obéi à des lois naturelles bonnes. En disant “ bonnes ”, je distingue les lois naturelles des instincts effrénés. Car dans ce qu’on appelle aujourd’hui “ lois naturelles ”, tout ne l’est pas, et tout n’est pas bon. Etaient bonnes toutes les lois attachées à la nature humaine que Dieu avait données aux premiers parents : le besoin de nourriture, de repos, de boisson. Puis, avec le péché, les instincts animaux ont pénétré et se sont mêlés aux lois naturelles, de même que les dérèglements, les sensualités de toutes espèces, souillant ce qui était bon, par manque de modération. Et Satan a entretenu le feu, fomenté les vices par ses tentations. Tu comprends maintenant que, si ce n’est pas un péché de céder au besoin de repos et de nourriture, c’en est un, en revanche, de faire bombance, de s’enivrer, de rester longtemps oisif. Même le besoin de s’unir et de procréer n’est pas un péché, au contraire Dieu a donné l’ordre de le faire pour peupler d’hommes la terre ; mais l’acte d’union pour la seule satisfaction des sens n’est pas bon. Es-tu convaincu aussi de cela ?

– Oui, Maître. Mais donne-moi une précision : ceux qui ne veulent pas procréer pèchent-ils contre Dieu ? Tu disais un jour que l’état de virginité est bon.

– C’est le plus parfait ; en cela, il est comparable à l’état d’une personne qui, non contente de faire bon usage des richesses, s’en dépouille radicalement. Ce sont des perfections auxquelles peuvent parvenir les créatures, et elles en seront grandement récompensées. Il y a trois perfections : la pauvreté volontaire, la chasteté perpétuelle, l’obéissance absolue en tout ce qui n’est pas péché. Elles rendent l’homme semblable aux anges. Et il en est une vraiment parfaite : donner sa vie par amour pour Dieu et ses frères. Cela rend la créature semblable à moi, parce qu’elle la porte à l’amour absolu. Et celui qui aime parfaitement est semblable à

Dieu, il est absorbé en Dieu et ne fait qu’un avec lui.

539.7

Sois donc en paix, mon bien-aimé. Il n’y a aucune faute en toi, je te l’affirme. Pourquoi donc pleures-tu davantage ?

– C’est qu’il y a toujours une faute : celle d’avoir su venir vers toi par besoin et d’avoir su veiller à cause de la faim, mais pas par amour. Je ne me le pardonnerai jamais, cela ne m’arrivera plus. Je ne dormirai plus pendant que tu souffres. Je ne t’oublierai jamais en dormant pendant que tu pleures.

– N’engage pas l’avenir, Jean. Ta volonté est prête, mais elle pourrait encore être vaincue par la chair. Tu te sentirais alors profondément et inutilement humilié, si ensuite tu te souvenais de cette promesse que tu te serais faite à toi-même, sans avoir pu la tenir en raison de la fragilité de la chair. Ecoute : voici ce que tu dois dire pour être en paix, quoi qu’il t’arrive. Répète après moi : “ Avec l’aide de Dieu, je me propose, autant qu’il me sera possible, de ne plus céder aux pesanteurs de la chair. ” Et sois ferme. Si ensuite un jour, même sans le vouloir, la chair, épuisée et affligée, arrive à vaincre ta volonté, eh bien, tu diras comme maintenant : “ Je reconnais que je suis un pauvre homme comme tous mes frères, et que cela me serve pour rabaisser mon orgueil. ” Oh ! Jean ! Jean !

Ce n’est pas ton sommeil innocent qui pourrait me peiner !

539.8

Tiens, prends, cela va te réconforter tout à fait. Nous allons les partager en bénissant ceux qui me les ont offertes. »

Il saisit les pommes maintenant cuites et toutes chaudes, en donne trois à Jean et en garde trois pour lui.

« Qui te les a données, Seigneur ? Qui est venu te trouver ? Qui savait que tu étais ici ? Je n’ai entendu ni voix ni pas. Et pourtant, je n’ai pas cessé de veiller depuis la première nuit…

– Je suis sorti au point du jour. Il y avait du bois devant l’entrée et, posés par-dessus, du pain, du fromage et des pommes. Je n’ai vu personne. Mais seuls certains hommes ont pu avoir le désir de répéter un pèlerinage et un geste d’amour… dit lentement Jésus.

– C’est vrai ! Les bergers ! Ils l’avaient annoncé : “ Nous allons nous rendre dans la terre de David… Ce sont des jours de souvenir… ” Mais pourquoi ne se sont-ils pas arrêtés ?

– Pourquoi ? Ils ont adoré et…

– Et ils ont eu pitié. Ils t’ont adoré, toi, et ils ont eu pitié de moi… Ils sont meilleurs que nous.

– Oui. Ils ont su garder leur volonté de faire le bien, et l’accroître. Pour eux, le don que Dieu leur a fait a été sans dommage… »

Jésus ne sourit plus. Il réfléchit et devient triste. Puis il se secoue. Il regarde Jean qui l’examine, et reprend :

« Eh bien ! Es-tu prêt à partir ? Tu n’es plus épuisé ?

– Non, Maître. Je ne vais pas être très résistant, je crois, car j’ai les membres endoloris, mais je pense pouvoir marcher.

– Dans ce cas, partons. Va prendre ton sac, pendant que je rassemble les restes dans le mien, et prenons la route. Nous allons nous diriger vers le Jourdain pour éviter Jérusalem. »

Et au retour de Jean, ils s’éloignent sur le même chemin qu’à l’aller, à travers la campagne qui se réchauffe au doux soleil de décembre.

539.1

È una serena ma rigida mattina d’inverno. La brina ha imbiancato dei suoi cristalli farinosi il suolo e le erbe, e ha fatto di qualche rametto secco giacente al suolo un prezioso gioiello spolverizzato di perline.

Giovanni esce dalla sua spelonca. È molto pallido nella sua veste nocciola scuro. Deve avere anche molto freddo o è sofferente. Non so. So che è di un pallore quasi livido ed ha il passo insicuro di chi non sta bene. Va verso il ruscello, resta incerto se tuffarvi le mani o no. Poi si decide e, fatta giumella delle stesse, beve un sorso di quell’acqua limpida ma certo molto fredda. Scuote le mani e se le finisce di asciugare nel lembo della veste. Poi resta incerto… Guarda verso la maceria dove è Gesù e guarda verso la sua. Torna verso la sua lentamente. Ma, giunto sull’apertura per la quale si entra, ha come un capogiro e traballa. Cascherebbe se non si afferrasse al muro semirovinato. Sta col capo contro il braccio ripiegato, afferrandosi al muro per qualche tempo, e poi alza la testa e si guarda intorno… Non entra più nella sua tana. Rasentando il muro, sostenendosi alle sporgenze scabre delle pietre denudate di intonaco, fa i pochi passi che lo separano dalla stalla dove è Gesù e, giunto quasi sulla soglia, si getta in ginocchio e geme: «Gesù, Signor mio, abbi pietà di me!».

539.2

Gesù presto appare: «Giovanni! Che fai? Che hai?».

«Oh! mio Signore! Ho fame! Sono quasi due giorni che non mangio nulla. Ho fame e freddo…», e batte i denti, pallidissimo.

«Vieni! Vieni dentro!», dice Gesù aiutandolo a rialzarsi.

L’altro, sorretto dal braccio di Gesù, gli piange col capo curvo sulla spalla e sospira: «Non mi punire, Signore, se ti ho disubbidito…».

Gesù sorride rispondendo: «Sei già punito. Sei come un che spira… Siedi qui, su questo sasso. Ora farò fuoco e ti darò da mangiare…», e Gesù accende coll’esca delle ramaglie e fa un bel fuoco sul rustico focolare presso la porta.

Odor di rami arsi e gaiezza di fiamme si spargono per la misera spelonca, e Gesù, infilato su uno stecco due pezzi di pane, li presenta alla fiamma e, quando li sente caldi, li copre del grasso cuore dei formaggi lasciati dai pastori, e il formaggio rinviene e fila sul pane che ora Gesù tiene sospeso sulla fiamma come fosse un piatto.

«Mangia ora e non piangere», dice sempre sorridendo e passando il pane a Giovanni, che piange senza rumore come un bambino sfinito, e non smette di lacrimare neppure mangiando con avidità quel cibo confortatore.

Gesù torna verso la mangiatoia e torna con delle mele, le sistema fra la cenere che s’è scaldata sotto il calore delle legna, che bruciano sostenute da due pietre che fanno da alari. «Va meglio ora?», chiede sedendosi presso il suo apostolo, che fa di sì col capo sempre lacrimando.

Gesù gli passa un braccio intorno alle spalle e lo attira a Sé, cosa che aumenta il pianto di Giovanni, ancor troppo sfinito e troppo turbato dalla paura, forse, di un rimprovero, dall’emozione di vedersi così accolto, per saper far altro che non sia piangere.

Gesù lo tiene stretto a Sé senza parlare, sinché l’altro mangia. Poi dice: «Per ora basta. Le mele le avrai più tardi. Vorrei darti un poco di vino, ma non ne ho. Ho trovato l’altro ieri, al­l’alba, fascine e cibo fuor dalla stalla. Ma non c’era vino. E perciò non te ne posso dare. Fosse più tardi, potrei cercare del latte a dei pastori che ho visto pascere il gregge oltre il ruscello. Ma, finché la brina non si è sciolta, non escono gli armenti…».

«Sto già meglio, Signore… Non ti affliggere per me».

«E tu allora di che ti affliggi, che sembri appunto un albero al quale il sole sciolga la brina?», dice Gesù sorridendo ancor più vivamente e baciando Giovanni sul sommo della fronte.

«Perché sono colmo di rimorsi, Signore… e…

539.3

Sì! Lasciami andare! Devo parlarti in ginocchio, chiederti perdono…».

«Povero Giovanni! Veramente lo sforzo superiore alle tue capacità ti ha indebolito anche l’intelletto. E credi tu che Io abbia bisogno delle tue parole per giudicarti e assolverti?».

«Sì, sì. Tu sai tutto, lo so. Ma io non avrò pace sinché non ti avrò detto il mio peccato, anzi i miei peccati. Lasciami andare. Lasciami accusare le mie colpe».

«Ebbene, parla, se ciò ti deve dar pace».

Giovanni scivola in ginocchio e, alzando il viso lacrimoso, dice: «Io ho peccato di disubbidienza, di presunzione e di… non so se dico bene a dirla “umanità”. Ma certo questa è la mia colpa più recente, più grave, quella che mi dà il dolore più grande e che mi dice quale servo inutile, anzi, più ancora, egoista, basso, io sono».

Le lacrime veramente gli lavano il volto, mentre a Gesù il sorriso fa il volto sempre più luminoso. Gesù sta un po’ curvo sul suo apostolo piangente, e il divino sorriso è tutta una carezza sul dolore di Giovanni. Ma Giovanni è così afflitto che non ha conforto neppure da quel sorriso e continua: «Ti ho disubbidito. Avevi detto che non dovevamo dividerci, e io mi sono diviso subito dai compagni e ho dato scandalo ad essi. Ho risposto malamente a Giuda di Keriot che mi faceva osservare che io peccavo. Ho detto: “Tu lo hai fatto ieri, ed io lo faccio oggi. Tu lo hai fatto per avere notizie di tua madre, io lo faccio per essere col Maestro e vegliare su Lui, difenderlo”… Ho presunto di me perché volevo fare questo… Io, povero inetto, difendere Te! E poi ho presunto perché ho voluto imitarti. Ho detto: “Certo Egli prega e digiuna. Io farò ciò che Egli fa e per la sua stessa intenzione”. E invece…».

Il pianto si muta in singhiozzi mentre la confessione della miseria dell’uomo, della materia che ha sopraffatto la volontà dello spirito, esce dalle labbra di Giovanni: «E invece… ho dormito. Subito ho dormito! E solo a giorno fatto mi sono destato e ti ho visto andare al rio, lavarti, tornare qui, e ho capito che avrebbero potuto anche catturarti senza che io fossi pronto a difenderti. E poi volevo fare penitenza e digiuno, ma non sono stato capace di farlo. A bocconcini, quasi per non mangiare, ho finito a mangiare il primo giorno il mio poco pane. Tu sai che non avevo altro. E non ero ancor sazio che avevo tutto finito. E il giorno dopo ho avuto ancor più fame, e questa notte… Oh! ieri notte poco ho dormito per fame e freddo, e questa notte mai ho dormito… e non ho saputo resistere più questa mattina… e sono venuto perché ho avuto paura di morire d’inedia… ed è questo quello che più mi fa male: di non avere saputo vegliare per pregare e vegliare su Te, ma di averlo saputo fare per i morsi della fame… Sono un servo sciocco e vile. Castigami, Gesù!».

539.4

«Povero fanciullo! Vorrei che tutto il mondo avesse a gridare queste tue colpe! Ma ascolta, alzati e ascoltami, ed il tuo cuore tornerà in pace. Hai disubbidito anche a Simone di Giona?».

«No, Maestro. Non lo avrei mai fatto, perché Tu hai detto che dovevamo stare a lui soggetti come a fratello maggiore. Ma egli, quando io gli ho detto: “Il mio cuore non sta tranquillo a vederlo andar solo”, ha risposto: “Hai ragione. Ma io non posso andare perché ho l’ubbidienza di guidare voi tutti. Vai tu, e Dio sia teco”. Gli altri hanno alzato la voce e Giuda più degli altri. Hanno ricordato l’ubbidienza e hanno anche rimproverato Simone Pietro».

«Hanno? Sii sincero, Giovanni».

«È vero, Maestro. È stato Giuda che ha rimproverato Simone e trattato male me. Gli altri hanno soltanto detto: “Il Maestro ha ordinato di stare insieme”. E a me, non al capo nostro, lo dicevano. Ma Simone ha risposto: “Dio vede il fine dell’atto e perdonerà. E il Maestro perdonerà, perché questo è amore”, e mi ha benedetto e baciato e mandato dietro di Te, come quel giorno[1] che Tu andasti con Cusa oltre il lago».

«E allora Io di questa colpa non ho da assolverti…».

«Perché è troppo grave?».

«No. Perché non esiste. Torna qui, Giovanni, al fianco del tuo Maestro e ascolta la lezione. Bisogna saper applicare gli ordini con giustizia e discernimento, sapendo comprendere lo spirito dell’ordine, non soltanto le lettere che compongono l’ordine. Io ho detto: “Non dividetevi”. Ti sei diviso e perciò avresti peccato. Ma prima Io avevo detto: “State uniti di corpo e di spirito, soggetti a Pietro”. Con quelle parole Io ho eletto lui mio legittimo rappresentante fra voi, con facoltà piena di giudicare e di comandare su voi. Perciò, quanto Pietro ha fatto o farà in mia assenza, sarà ben fatto. Perché, avendolo Io investito del potere di guidarvi, lo Spirito del Signore, che è in Me, sarà anche con lui e lo guiderà nel dare quegli ordini che le circostanze impongono e che la Sapienza suggerirà all’Apostolo capo per il bene di tutti. Se Pietro ti avesse detto: “Non andare” e se tu fossi ugualmente venuto, neppure il movente buono del tuo atto — il volermi seguire per amore che vuol difendere ed essere con Me nei pericoli — sarebbe stato sufficiente ad annullare la tua colpa. Ci sarebbe proprio voluto il mio perdono. Ma Pietro, il tuo Capo, ti ha detto: “Va’”. L’ubbidienza a lui ti giustifica completamente. Ne sei persuaso?».

«Sì, Maestro».

539.5

«Devo assolverti dalla colpa di presunzione? Dimmi, senza riflettere se Io vedo il tuo cuore. Hai tu presunto con superbia di volermi imitare per poter dire: “Colla mia volontà ho abolito le necessità della carne, perché io posso ciò che voglio”? Pensaci bene…».

Giovanni riflette. Poi dice: «No, Signore. Esaminandomi bene no, non l’ho fatto per questo. Speravo poterlo fare perché ho capito che la penitenza è sofferenza della carne, ma è luce dello spirito. Ho capito che è un mezzo di fortificare la nostra debolezza e ottenere tanto da Dio. Tu lo fai per questo. Io per questo lo volevo fare. E credo di non errare dicendo che, se lo fai Tu forte, Tu potente, Tu santo, io, noi, lo dovremmo fare sempre, se sempre fosse possibile farlo, per essere meno deboli e materiali. Ma non l’ho potuto fare. Ho sempre fame io, e sonno tanto…», e il pianto riprende a gocciare lento, umile, vera confessione della limitatezza delle capacità umane.

«Ebbene, anche questa piccola miseria della carne credi tu che sia stata inutile? Oh! come te la ricorderai in futuro, quando sarai tentato ad essere severo ed esigente coi tuoi discepoli e fedeli! Essa ti riaffiorerà alla mente dicendoti: “Ricordati che tu pure hai ceduto alla stanchezza, alla fame. Non volere gli altri più forti di te. Sii padre dei tuoi fedeli come il tuo Maestro fu un padre per te quella mattina”. Tu avresti potuto benissimo vegliare e non sentire poi questa gran fame. Ma il Signore ha permesso che tu soggiacessi a questi bisogni della carne per farti umile, sempre più umile e sempre più compassionevole ai tuoi simili.

539.6

Molti non sanno distinguere fra tentazione e colpa consumata. La prima è una prova che dà merito e non leva grazia, la seconda è caduta che leva merito e grazia. Altri non sanno distinguere fra eventi naturali e colpe, e si fanno scrupolo di aver peccato mentre, ed è il tuo caso, non hanno che ubbidito a leggi naturali buone. Distinguo, dicendo “buone”, le leggi naturali dagli istinti sfrenati. Perché non tutto ciò che ora si dice “legge di natura” è tale ed è buona. Buone erano tutte le leggi connesse alla natura umana, che Dio aveva date ai progenitori: il bisogno del cibo, del riposo, della bevanda. Poi, col peccato, sono subentrati e si sono mescolati alle leggi naturali, inquinando con la smoderatezza ciò che era buono, gli istinti animali, le sregolatezze, le sensualità d’ogni specie. E Satana ha tenuto vivo il fuoco, il fomite dei vizi col suo tentare. Ora tu vedi che, se non è peccato cedere al bisogno di riposo e di cibo, è invece peccato la gozzoviglia, l’ebrietà, l’ozio prolungato. Anche il bisogno di coniugarsi e procreare non è peccato, anzi Dio ha dato l’ordine di farlo per popolare la Terra di uomini. Ma non è più buono l’atto del congiungimento per sola soddisfazione del senso. Sei persuaso anche di questo?».

«Sì, Maestro. Ma allora dimmi una cosa. Coloro che non vogliono procreare, peccano ad un ordine di Dio? Tu dicesti una volta che lo stato di vergine è buono».

«È il più perfetto. Come è il più perfetto quello di chi, non pago di fare buon uso delle ricchezze, se ne spoglia del tutto. Sono le perfezioni alle quali può giungere una creatura. E gran premio avranno. Tre sono le cose più perfette: la povertà volontaria, la castità perpetua, l’ubbidienza assoluta in tutto ciò che non è peccato. Queste tre cose rendono l’uomo simile agli angeli. E una è perfettissima: dare la propria vita per amore di Dio e dei fratelli. Questa cosa rende la creatura simile a Me, perché la porta all’assoluto amore. E chi ama perfettamente è simile a Dio, è assorbito e fuso con Dio.

539.7

Sta’ dunque in pace, mio diletto. Non c’è colpa in te. Io te lo dico. Perché dunque aumenti il tuo pianto?».

«Perché una colpa c’è sempre. Quella di aver saputo venire da Te per bisogno e aver saputo vegliare per fame, e non per amore. Non me lo perdonerò mai. Non mi accadrà più. Non dormirò più mentre Tu soffri. Non ti dimenticherò dormendo mentre Tu piangi».

«Non impegnare il futuro, Giovanni. La tua volontà è pronta, ma ancora potrebbe essere sopraffatta dalla carne. E ne avresti profondo e inutile avvilimento se poi ti sovvenissi di questa promessa fatta a te stesso, non mantenuta poi per fralezza di carne. Guarda. Io ti dico ciò che devi dire per essere in pace, qualunque cosa ti avvenga. Di’ con Me: “Io, con l’aiuto di Dio, propongo, per quanto mi sarà possibile, di non più cedere alle pesantezze della carne”. E sta’ fermo in questo volere. Se poi un giorno, pur non volendolo, la carne stanca e afflitta vincerà la tua volontà, ebbene, allora come ora dirai: “Riconosco di essere un povero uomo come tutti i miei fratelli, e ciò mi serva per tener mozzo il mio orgoglio”. Oh! Giovanni, Giovanni! Non è il tuo sonno innocente quel che può darmi dolore!

539.8

Tieni. Queste ti riconforteranno del tutto. Le dividiamo insieme, benedicendo chi me le ha offerte», e prende le mele ormai cotte e bollenti, e ne dà tre a Giovanni e tre le tiene per Sé.

«Chi te le ha date, Signore? Chi è venuto da Te? Chi sapeva che qui eri? Io non ho sentito voci né passi. Eppure, dopo la prima notte, ho sempre vegliato…».

«Sono uscito alla prima luce. Vi erano fasci di legna davanti l’entrata e sopra pane, formaggi e mele. Non ho visto nessuno. Ma solo alcuni possono aver avuto desiderio di ripetere un pellegrinaggio e un gesto d’amore…», dice lentamente Gesù.

«È vero! I pastori! Lo avevano detto: “Andremo nella terra di Davide… Sono giorni di ricordi…”. Ma perché non si sono fermati?».

«Perché! Hanno adorato e…».

«E hanno compatito. Adorato Te e compatito me… Sono migliori di noi quegli uomini».

«Sì. Hanno serbato buona, sempre più buona la loro volontà. Per loro non fu danno il dono che Dio ha loro dato…». Ge­sù non sorride più. Pensa e si fa triste.

Poi si scuote. Guarda Giovanni, che lo guarda, e dice: «Ebbene? Vogliamo andare? Non sei più sfinito?».

«No, Maestro. Non sarò molto resistente, credo, perché ho le membra indolenzite. Ma credo che posso camminare».

«E allora andiamo. Va’ a prendere la tua sacca, mentre Io raccolgo gli avanzi nella mia, e andiamo. Prenderemo la via che va verso il Giordano per evitare Gerusalemme».

E al ritorno di Giovanni si rimettono in cammino, rifacendo la via fatta nel venire e allontanandosi per la campagna che si riscalda al mite sole decembrino.


Notes

  1. comme le jour, en 464.14/15.

Note

  1. come quel giorno, in 464.14/15.